• Un souvenir ne peut être oublié volontairement et les données rappelées peuvent être inexactes.

    Un souvenir de peut être oublié volontairement et les données rappelées peuvent être inexactes.

                 Mon article sera la suite de celui d’hier et nécessite que vous l’ayez lu, si vous voulez, aujourd’hui, comprendre si on peut ou non oublier volontairement un souvenir, et si un souvenir oublié peut être rappelé et si ses données sont véritables.

               De nombreuses études ont été faites sur des participants volontaires et ont montré qu’il était impossible d’oublier volontairement et rapidement un souvenir qui avait été consolidé et donc inscrit dans notre mémoire à long terme. Au contraire les efforts pour l’oublier le rappelait davantage.
              La seule façon d’oublier est d’y penser le moins possible et de laisser faire le mécanisme naturel d’oubli.
              On peut d’ailleurs constater qu,e dans notre mémoire épisodique, nous avons peu de souvenirs des innombrables instants passés de notre vie, surtout ancienne, et ces souvenirs pérennes sont le plus souvent ceux qui ont une certaine importance pour nous, notamment émotionnelle.
             L’émotion peut être sentimentale, altruiste, celle d’un instant de bonheur ou au contraire d’une catastrophe horrible, mais aussi la curiosité, la première fois où nous avons vu un phénomène étonnant, bref une émotion causée par la montée d’adrénaline.
              Nous ne sommes toutefois pas égaux quant au contrôle de notre mémoire. Le pessimiste dont les centres amygdaliens sont très actifs, va se rappeler plus souvent les souvenirs pénibles ou préoccupants, alors que l’optimiste, dont le cortex préfrontal contrôle mieux la mémoire, va plutôt se rappeler les instants heureux.
             En fait nous rappelons souvent les souvenirs importants, ceux qui nous plaisent ou nous préoccupent, et donc nous les consolidons à chaque fois, mais il faut être conscient que nous les réenregistrons en les modifiant, en y rajoutant des éléments récents, et en mélangeant parfois des souvenirs distincts. Nos souvenirs évoluent donc et s’éloignent de la réalité initiale.

               On ne peut donc pas oublier rapidement et volontairement un souvenir qui est ancré dans notre mémoire à long terme.

             Certains souvenirs peuvent cependant être oubliés involontairement.
            
    Il s’agit essentiellement de souvenirs traumatiques pour lesquels le cerveau va essayer de protéger l’individu en l’empêchant de se remémorer le souvenir traumatisant.

            Je ne parle pas ici d’un choc physique sur le crâne qui aurait causé un dommage au cerveau, mais d' un phénomène neurologique spontané et inconscient. La personne ne se souvient plus du traumatisme qu’elle a subi.
           
    De très nombreuses études ont été faites à ce sujet, surtout depuis 1980, principale-ment sur des soldats américains traumatisé par les combats qu’ils ont vécu, les victimes ou témoins d’attentats et de tueries dans les établissements scolaires aux USA, et des enfants victimes de violences.

             Trois théories expliquent le phénomène.

             Jusque dans les années 80 la « théorie des souvenirs refoulés » a prévalu. Elle était soutenue par Freud et ses disciples notamment Lacan.
             Le souvenir traumatisant est refoulé dans l’inconscient et conservé intact, mais il ne peut plus remonter à la conscience afin de protéger l’individu. Il peut éventuellement réapparaître peu à peu par bribes et flashs, soit à la suite d’un événement déclencheur, soit suite à une psychothérapie. 
            Freud admettait toutefois que « les souvenirs réapparus peuvent aussi représenter des fantasmes nés de pulsions refoulées » et donc non conformes à la réalité.

             Les connaissances sur le cerveau ont progressé, même si l'on connaît encore insuffisamment le fonctionnement de notre mémoire;, et elles ont montré que cette théorie n'était pas valable.
            Dans les années 70 et 89, de nombreuses erreurs judiciaires s’étant produites au USA, elle a peu à peu été remplacée par deux autres, notamment sous m’impulsion de la chercheuse et psychologue cognitiviste américaine, Elisabeth F. Loftus, spécialiste de la mémoire humaine.

             Oublier est impossible ou correspond à une destruction du souvenir. Un souvenir qui n’a pas été évoqué depuis très longtemps n’est pas oublié et peut donc remonter à la conscience, mais entier et d’un seul coup et peut comporter, comme tout souvenir des éléments inexacts.
             Mais un souvenir oublié qui remonte par flashs est, dans presque tous les cas,  un faux souvenir par mélange avec d’autres souvenirs, correspondant à des souhaits non réalisés ou surtout d’éléments suggérés par des lectures ou des questions des psychothérapeutes.       
          Madame Loftus a réalisé des expérimentations dans lesquelles elle avait réussi à créer chez ses patients, de faux souvenirs (non traumatisants par souci éthique) et elle affirmait : "La mémoire ne fonctionne pas comme une cassette vidéo, nous ne pouvons pas enregistrer quelque chose et le revoir plus tard. Nous enregistrons des bribes de nos expériences et les combinons ensemble. Nous construisons fondamentalement nos souvenirs et nous ne pouvons pas faire toujours confiance en notre mémoire" 
             Les souvenirs ne peuvent être refoulés puis récupérés comme un film que l'on n'oserait visionner.

             La troisième théorie reprend la précédente, mais en admettant des exceptions.
            
    Elle admet que le rappel du souvenir peut être « bloqué » sans pouvoir être remémoré, pour protéger le cerveau de la personne traumatisée. Ce souvenir peut être récupéré dans des circonstances diverses, mais il faut être très prudents quant à la véracité des éléments récupérés qui peuvent être influencés ou transformés en fonction de circonstances propres à la personnes, extérieures: ou relatives aux conditions dans lesquelles le souvenir a été remémoré. 
            La personne qui recouvre le souvenir est le plus souvent de bonne foi. Son souvenir lui paraît vraisemblable, surtout s'il a été retrouvé grâce à des personnes dépositaires d'un certain savoir, qui n'ont pas été assez prudentes, sans s'en rendre compte.
            Mais, même s'il n'est pas construit de toutes pièces, il contient de nombreuses inexactitudes, par mélange du passé et des souhaits inconscients du présent.
            La justice américaine n’admet donc pas un souvenir récupéré comme une preuve, mais comme une simple présomption, qui doit être consolidée par des preuves réelles pour aboutir à une poursuite judiciaire.

          Un document d'un psychologue canadien résume bien cette situation : je vous en donne l'adresse : https://www.ordrepsy.qc.ca/-/la-detection-de-faux-souvenirs

            Je n’ai pas d’exemple personnel correspondant à ces théories, mais je peux vous donner un exemple quant au peu de fiabilité d’un souvenir traumatisant.

            J’avais une douzaine d’années et j’étais avec un camarade de classe sur un trottoir, qui tenait son vélo par le guidon, les roues étant dans la rue. Un camion, qui roulait trop près et trop vite, a accroché le vélo et entraîné mon camarade, qu’il a heurté avec ses roues arrière. L’ambulance est venue très vite, le médecin a intubé et posé un cathéter sur place puis mon camarade a été emmené aux urgence où malheureusement il est décédé peu après.. Pendant trois mois je n’ai pas pu repasser par cette rue et l’image de mon camarade blessé m’a poursuivie.
           Trois ans après je roulais sur une rue étroite, bordée d’immeubles, sur le vieux vélo de ma mère à col de cygne. En bas de la rue une avenue plus grande et j’ai vu un camion qui passait; j’ai commencé à freiner, mais je ne pouvais voir (les immeubles me le cachaient),  que le camion avait une remorque que j’ai percutée. Heureusement le cadre du vélo (sans barre) s’est plié et a amorti le choc, mais j’ai cogné le coté du camion avec ma tête et j’ai été assommé.
            Je me souviens m’être réveillé à l’hôpital un tube dans ma gorge, des tuyaux dans le nez et un cathéter dans le bras mais je ne sais pas quand on me le a enlevés. Je ne les avais plus quand mes parents sont arrivés, mais je leur ai raconté la scène
             Mes parents ont vu le médecin et quand ils sont revenus ils m’ont dit que je n’avais été qu’assommé et qu’on m’avait seulement fait une piqûre et une radio du crâne.
             Je croyais tellement à mon souvenir que j’ai dû aller lire le compte rendu de l’hôpital et celui de la police pour me convaincre. Mon souvenir était le mélange de la réalité et de l’accident de mon camarade.!

             J’espère que la lecture de ces quatre articles ne vous a pas trop éprouvé et qu’ils ont répondu aux questions qui m’avaient été posées.


             

     

              

     

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