• Qu'est ce que la laïcité pour moi.

    Qu'est ce que la laïcité pour moi.


         Sans doute le confinement, puis la reprise des classes primaires, puis maintenat des collèges, a inspiré quelques très jeunes à la réflexion

        Alors un très jeune m'a demandé, "alors toi, un vieux, que penses tu de la laïcité.

          Je n’aime guère parler politique ou religion, car je considère que chacun peut avoir son opinion et je ne veux pas choquer par mes remarques personnelles.
          Mais je ne me “défilerai” pas non plus, d'autant plus que j'ai déjà répondu à des questions analogues sur d'autres blogs, et donc ce qui suit ne concerne que mon sentiment personnel, d'ailleurs un peu grincheux et critique.

    La laïcité j’ai connu cela tout enfant, d’une part parce qu’en CM1 et CM2, nous avions des “cours d’instruction civique” de notre instit, et d’autre part parce que, ma grand mère m’ayant appris à lire très tôt et mon grand père quelques notions de maths., je me suis retrouvé en CM1 j’avais six ans et demi.
        Que faisait on dans ces cours? On apprenait ce qu’était commune, canton, département, le rôle des maires et députés, et les grands principes de la constitution. Nous allions visiter avec notre institutteur, la mairie, le commissariat de police, le tribunal et l’hôpital.
        La laïcité faisait partie d’un principe plus important : la liberté en général, puis la “liberté de penser” (pour un adulte on appellerait cel la “liberté d’opinion”).
        Ce n’étaient pas des cours “magistraux” mais une discussion où l’instituteur nous exposait une idée simple, puis nous demandait ce que nous en pensions, nous donnait ou nous demandait des exemplles pratiques, et c’était finalement un apprentissage très concret et “utilisable”.

        Nous apprenions en CM1 et CM2, que tout homme était libre d’agir à condition que son action n’apporte pas une gêne importante aux autres et ne gêne pas le fonctionnement de la société : on nous faisait écrire le grand principe “la liberté de chacun s’arrête là ou commence celle de l’autre”.
        Qu’ensuite chacun était librede penser selon ce qu’il estimait être le mieux, en particulier au plan politique et religieux, mais à condition de considérer ses opinions comme personnelles et de ne pas exiger de son voisin d’avoir les mêmes.
        La laïcité s’inscrivait à l’intérieur de ces notions : c’était d’une part la liberté d’opinion religieuse, et le respect de la religion des autres, mais avec une certaine discrétion pour ne pas les gêner. (on ne parlait pas de signes ostentatoires de nos croyances, mais il ne serait venu à l’idée de personne de telles démonstration).
        C’était aussi la “séparation de l’Eglise et de l’Etat”,
    où l’on nous disait que l’Etat n’avait pas à prende en charge financièrement le fonctionnement des églises, n’avait pas à dicter la conduite des prêtres et qu’en contrepartie, les prêtres n’avaient pas à s’occuper de politique au nom de l’Eglise.

        On nous disait aussi que nous étions libres d’aller suivre  des cours d’instruction religieuse de notre choix, mais que ce ne serait pas au lycée, mais à l’église, au temple ou à la synagogue voisines.
        Dans le même cadre, on nous montrait que blanc, jaune, noir ou indien, nous étions tous des hommes, qui avions au départ les mêmes possibilités de corps et d’esprit, même si ensuite les éducations et les moeurs étaient différentes, que les coutumes des autres pays étaient respectables et devait être respectées si on se rendait dans ces pays, mais que les étrangers devaient respecter les nôtres, quand ils étaient en France.
        Par des exemples de la vie de tous les jours, l’instituteur nous montrait ce qu’étaient la loi, les règles juridiques, mais aussi les règles de la société et pourquoi elles étaient faites et utiles et pourquoi il fallait les respecter dans l’intérêt des autres et de nous mêmes, car elles nous protégeaient des autres comme elles nous éviter de leur porter préjudice.   
        Il nous montrait comment, en l’absence de rêgles, la vie en commun n’était pas possible, en prenant des exemples de conduite automobile, de trafic ferroviaire ou de comportement de tous les jours. C’était au passage des notions de respect de la propriété d’autrui, de l’environnement, du travail des autres.

        Par la suite au lycée (qui était alors de la 6ème à la terminale; les collèges n’existaient pas et il n’y avait pratiquement pas dans le sud de la France, d’écoles privées, sauf des orphelinats), nous étudions en histoire l’influence de l’Eglise, du Pape et des membres du clergé sur le devenir de la France du temps des rois, et nous voyons qu’à l’origine, la laïcité était venue par réaction, pour diminuer cette influence, sous la Révolution française.
        Nous apprenions la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905 en même temps que l’organisation de l’enseignement laÎque et obligatoire pour tous, de Jules Ferry. Mais la constitution de 1958 n’existait pas encore.
        Mais surtout en 1940, la guerre s’est chargée de nous montrer en positif et en négatif l’utilité de cet enseignement.
        Ma grand-mère était alsacienne, et heureusement, elle limitait à la famille et quelques amis son opinion sur Hitler et le nazisme, sinon elle aurait été arrêtée par la gestapo et envoyée dans les camps de la mort.
        Mon père s’occupait de la résistance et de soustraire aux allemands des juifs et l’étoile jaune imposée aux juifs nous apparaissait comme un signe ostentatoire odieux et nous rapprochait d’eux, que nous soyons chrétiens ou non croyants.   
        Pas besoin de grands discours sur la liberté et la tolérance : nous avions la démonstration des malheurs qu’entrainait leur absence.

        Lorsque j’étais à l’X, j’ai fait un stage ouvrier dans une aciérie de l’est et j’étais logé , dans la cité ouvrière avec des ouvriers algériens. J’y ai reçu un accueil chaleureux et on ne s’apercevait pas qu’ils étaient musulmans et ils étaient aussi français que moi, respectueux des lois et des coutumes françaises et discrets sur les leurs.
        J’ai travaillé plus tard au Sahara, au sein de populations semi-nomades et comme nous nous respections mutuellement, notre entente était très bonne.        
        Alors pour moi, je n’ai pas besoin d’un débat sur la laîcité, elle fait partie de mon éducation et de mon vécu.

        Pour moi la laïcité n’est donc qu’un des volets de la liberté, c’est la neutralité et l’autorité de l’Etat qui doit assurer  l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, de religion, ou d’opinions.
        Mais c’est vrai que la société a bien changé depuis que j’étais enfant.

        Si l’Allemagne ne connaît plus la dictature et le totalitarisme, c’est le cas dans de nombreux pays, les luttes de pouvoir entre religions ou ethnies empoisonnent la vie du Moyen-orient et de l’Afrique, les sectes et les fondamentalistes sont apparus, le communautarisme s’est développé, l’Etat ne fait plus grand chose pour intégrer les immigrés et a tendance à les rassembler dans des ghettos, le racisme et la xénophobie se sont développés, En matière de religion, l’antisémitisme et le racisme contre les musulmans se sont aggravés de façon importante. Le chômage et la pauvreté sont dévenus des fléaux et l’Etat n’a pas fait suffisamment dans ce domaine.
        L’enseignement est devenu paradoxalement plus théorique, avec beaucoup d’options à la place d’un enseignement général, et il n’est plus aussi pragmatique et orienté vers la vie de tous les jours.
    Surtout je suis effaré que 15 % de la population ne sait pas ou à peine lire et écrire, alors que, lorsque je faisais mon service militaire, il n’y en avait que 3% des hommes (en général des bateliers ou gens du voyage) et qu’on se faisait un devoir de leur apprendre pendant leur service militaire.
        L’usage de la drogue s’est banalisé et l’insécurité s’est considérablement aggravée.
        La vie est devenue trépidante et beaucoup de gens égoïstes. On s’en rend compte dans les immeubles où chacun ne respecte plus son voisin. C’est chacun pour soi, avec un esprit de rivalité et de compétition, et souvent donc d’affrontement des opinions, qu’elles soient politiques ou religieuses.
       
        Cela dit je ne crois pas que les grandes démonstrations et discussions médiatiques apportent grand chose au problème de respect de la laïcité, ni la manie de légiférer à tout crin.
        Il y a un arsenal de lois bien suffisant pour lutter contre les manquements à la laïcité.
        Personnellement je suis persuadé que, si on faisait des actions efficaces qui permettent de diminuer le chômage, la pauvreté, le traffic de drogues, l’insécurité des banlieues, si on arrêtait de détruire l’école et les hôpitaux publics, que l’on fasse un effort d’intégration des communautés ethniques et religieuses, que les jeunes trouvent un intérêt et une utilité à l’enseignement à l’école et un emploi à sa sortie, que l’on arrive à enseigner à chacun de faire un effort pour supporter et ne pas ennuyer le voisin, les problèmes de laïcité seraient secondaires.
        Pour moi, ce n’est que l’arbre qui cache la forêt, des réactions qui traduisent le malaise et les défauts plus graves de notre société et évidemment c’est plus facile de traiter un arbre que toute la forêt, mais cela ne suffit pas pour sauver celle-ci.

        Et comme je suis fidèle à mes principes, j’admets volontiers que vous n’ayez pas les mêmes opinions que moi et que vous le disiez dans vos commentaires.

     

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