• Qu'est ce que l'impulsivité ?

     

    Qu'est ce que l'impulsivité ?

     

          J'ai lu une thèse de Joel Billieux sur l'impulsivité, qu'il a passée à l'université de Genève, au service de psychopathologie et de neuropsychologie.
        Cette étude est intéressante car elle décortique les aspects de l'impulsivité et j'essaierai ensuite de la rattacher à l'usage du portable.

        L'impulsivité c'est le manque de patience lorsque l'on cherche à satisfaire un désir, à obtenir satisfaction, une tendance à agir selon ses pulsions et donc un faible contrôle de soi.
        Joel Billieux distingue quatre composantes de l'impulsivité :

        “L'urgence “, c'est avoir de fortes réactions face à une situation, lorsque la personne est en proie à une émotion forte positive ou négative, au risque d'avoir des réactions regrettables.
        Les personnes ayant une forte composante d'urgence réagissent sans prendre assez de recul sous le coup de l'émotion, et peuvent se mettre en colère, avoir des mots vifs pour une personne, faire des gestes regrettables.
        C'est probablement dû entre autres, à une forte activité des centres amygdaliens du cerveau et à une insuffisance de contrôle de ses réactions par les cortex frontaux et préfrontaux qui doivent inhiber les réactions exagérées.

        “Le manque d'anticipation” désigne le fait de ne pas savoir suffisamment prévoir les conséquences de ses actions avant de s'y engager. C'est une prédisposition à se focaliser sur le présent plutôt que sur l'avenir.
        C'est peut être le cas des personnes de préférence cérébrale de perception “sensitif” “S” mais c'est aussi celui de personnes dont le cortex préfrontal ne remplit pas suffisamment ce rôle de prévision.
        Rappelons nous que les adolescents n'ont pas un cortex préfrontal arrivé à maturité.

        “Le manque de persévérance” est une difficulté à rester concentré sur une tâche éventuellement longue, difficile et fastidieuse. Elle serait liée à une faible capacité de la personne à résister à l'intrusion de pensées, images et souvenirs qui peuvent distraire la personne de sa tâche et en perturber le déroulement et la réalisation.
        C'est peut être le cas des personnes de préférence cérébrale de perception “global” “G” mais c'est aussi celui de personnes dont les centres du cortex et du cerveau émotionnel chargés de maintenir l'attention ne remplissent pas suffisamment leur rôle.
        La sérotonine est un neuromédiateur qui joue un rôle important dans ce domaine. 
    Les adolescents, outre un cortex préfrontal non totalement mature, peuvent avoir des troubles de la sécrétion de sérotonine, (en partie dus à la puberté), ce qui rend plus difficile leur concentration sur une tâche et il faut particulièrement les habituer à cet effort. 
        En effet interrompre sa réflexion pour penser à ses amis, à un jeu, une soirée, une sortie, consulter un SMS... oblige à tout reprendre depuis le début et donc à perdre énormément de temps.

        Enfin la recheche de sensations fortes et la prise de risque est le quatrième facteur de l'impulsivité; c'est la tendance à apprécier et rechercher des activités excitantes et de nouvelles expériences.
        Au début de l'adolescence, le cerveau, considérant que la période d'apprentissage intensif de l'enfant est terminée, réduit d'un tiers les connexions des centres de récompense et de sanction, dont le rôle est de déclencher un certain plaisir par la libération de dopamine, un neurotransmetteur très important.
        Dès lors l'adolescent a besoin de sensations plus fortes pour déclencher ces réactions de récompense et donc, comme par ailleurs son cerveau préfrontal ne maîtrise pas bien la prévision des conséquences de ses actes, il prend des risques inconsidérés.

    Quel est  le comportement d'une personne impulsive, notamment un ado : on peut avoir trois approche :

         D'abord au plan intellectuel , la personne
            - ne sait pas bien lorsqu'un problème se présente, réfléchir à la situation et prévoir les conséquences de ses actes.
            - a tendance à suivre ses émotions qu'elle contrôle mal, plutôt qu'un raisonnement, et à répondre à partir de ses premières pulsions..
            - évalue mal le risque et a tendance à rechercher des émotions fortes.   
            - a du mal à se concentrer et à faire preuve de persévérance.

        Au niveau des actions normales la personne :
            - supporte mal que ses désirs ne soient pas vite satisfaits.
            - peut être hyperactive, avec un niveau d'activité excessif et perturbateur, par exemple un enfant rencontre de la difficulté à rester en classe dans les rangs ou devant son bureau et à attendre son tour dans les jeux.
            - se précipite souvent pour répondre aux questions sans attendre qu'on ait terminé de les poser.       
            - parle souvent trop, sans tenir compte des conventions sociales; Interrompt par exemple autrui, impose sa présence ou intervient sans raison dans les discussions ou les jeux des autre.
            - a du mal à respecter les règles, refuse souvent de répondre à une demande ou d'obéir et claque les portes.
            - elle a du mal à écouter, à se concentrer sur son travail ou sur une tâche fastidieuse, parce qu'elle est distraite par le moindre incident, ou par ses propres pensées et rêveries.
            - agit spontanément, sans réfléchir aux conséquences, et prend donc des risques excessifs notamment dans des “jeux” qui peuvent se révéler dangereux.
            - elle peut avoir deux types d'impulsions:  impulsion positive (acte pour sauver quelqu'un sans réfléchir au danger); impulsion négative (violence).

        La personne peut même faire preuve de violence :
            - elle veut toujours avoir raison sans écouter l'autre
            - elle cherche la bataille facilement et peut faire des colères très violentes entraînant la destruction de beaucoup de choses, brutaliser et briser des objets.
            - elle peut même utiliser la violence physique.

        Que dire du rapprochement de ces quatre facettes de l'impulsivité, avec l'usage par les adolescents du téléphone portable ?
        D'abord on vient de le voir, les adolescents du fait de leur évolution cérébrale sont tous plus ou moins impulsifs et donc agissent dans l'urgence (et cela d'autant plus qu'ils ont la préférence cérébrale “P” d'adaptation aux événements); ils manquent d'anticipation et de persévérance et recherchent les sensations fortes.
        Bien entendu l'intensité de cette impulsivité dépend de leur personnalité (préférences cérébrales notamment), et du développement plus ou moins rapide de leur cerveau, sous l'effet notamment de l'éducation, de l'instruction et du vécu.
        L'impulsivité est un trait de comportement fréquent à l'adolescence; mais certains adolescents ne supportent aucune limite, ne supportent aucune frustration, et dès qu'ils éprouvent un certain désir ou besoin, ils doivent aussitôt le satisfaire ou l'accomplir.

        Un haut niveau “d'urgence” se traduit par un usage éventuellement regrettable du téléphone portable, des difficultés financières d'utilisation et un certain niveau de dépendance.
        Lorsque ces personnes sont  sous le coup d'une émotion, elles ne peuvent s'empêcher de se servir de leur portable pour parler immédiatement de cette situation, à chaud et sans recul suffisant, et le dialogue peut tourner mal.
        Cela peut aussi arriver simplement pour répéter à son chéri “jtm”.
        Dès lors ne pouvoir se servir du portable représente une forte contrainte qui se traduit par un sentiment de dépendance et peut conduire à des utilisations dangereuses (au volant par exemple).
        L'envie irrésistible de téléphoner qui entraîne une utilisation intensive du téléphone portable, coûte cher financièrement !

        Le manque d'anticipation sur les conséquences des actes entraîne (associé au haut niveau d'urgence), l'utilisation du téléphone en des lieux et devant des personnes, qui apporte une gêne et peut entraîner dans certains cas des remontrances ou des sanctions. (utilisation en classe, dans une conférence, au cinéma, au volant, dans le métro)
        Je me souviens d'un voyage dans l'Eurostar où je n'entendais pas ce que me disait mon voisin de fauteuil en raison du niveau sonore de toutes les personnes qui téléphonaient.

        Les personnes qui ont de faibles niveaux de concentration font un usage immodéré du portable, tant en nombre de communications qu'en durée.
        La multiplication des pensées intrusives ramène à l'esprit une multitude de sujets de conversation, incitant à téléphoner et entraine à aborder de nouveaux thèmes de conversation, qui augmentent sa durée.

        La recherche de sensation peut être liée à l'utilisation dangereuse du téléphone (au volant ou en filmant des images... ). Mais elle peut aussi aggraver le sentiment de solitude et donc pousser à contacter d'autres personnes.

        Finalement on peut dire que certaines caractéristiques de la personnalité liées à l'impulsivité et à un manque de contrôle de soi, peuvent entraîner un usage du téléphone portable ayant des conséquences néfastes, sur soi même et sur les autres, notamment chez les adolescents dont le cerveau n'a pas atteint encore sa maturité.
        Mais je me pose aussi la question inverse : l'utilisation du téléphone portable intensive et alors qu'on est trop jeune, ne perturbe t'elle pas le développement de la personnalité, habituant les jeunes à l'impulsivité et les empêchant d'acquérir un contrôle suffisant de soi, face aux émotions et aux pulsions.?
        De plus, en privilégiant la communication instantannée, le portable n'est il pas un handicap à la projection sur le futur et la planification des décisions et de l'action ?

     

    Partager via Gmail

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :