• Nos souvenirs d’enfance sont ils réels ?

    Nos souvenirs d’enfance sont ils réels ?

              Je traiterai aujourd’hui des souvenirs de notre vie, qui se transforment tout au long de celle-ci.
              Que disent les chercheurs en neurologie, et quelles sont mes expériences personnelles. ?  
              Ce que je vais écrire est moins valable pour l’apprentissage de nos connaissances.

             Y a t’il une sélection, une transformation de ce que nous mémorisons ?
             
             Nous mémorisons avant tout des sensations : images, sons, toucher, odeur, goût et nous accompagnons ces souvenirs de mots qui les décrivent, mais ces mots nous en avons compris la compréhension à partir des images et sensations correspondantes. Les images peuvent être très diverses, paysages, personnes, objets, actions, scènes ….

             En plus des sensations issues de nos sens, nous avons éventuellement le souvenir de sensations internes, provenant des centres qui commandent nos muscles ou de ceux qui enregistrent l’état de nos muscles, la position de nos membres. Celles aussi provenant des viscères, notamment par le canal de l’insula, et les sensations de douleurs, que transmet notamment l’hypothalamus.
             Enfin nous mémorisons des pensées et des émotions. Et l’unanimité des chercheurs reconnait que les souvenirs fortement émotionnels sont plus fortement ancrés dans notre mémoire et que, même si nous ne les rappelons pas souvent, ils sont moins vite oubliés.
             Des personnes différentes ne mémoriseront pas le souvenir de la même façon. Au niveau des sensations une personne de préférence cérébrale « S », enregistrera plus de détails qu’une personne « G », qui par contre retiendra mieux des aspects plus abstraits du souvenir ou ses données Essen tiellesl. Une personne de préférence cérébrale V sera plus sensible à l’empathie, une personne « L » aux aspects logiques.
             Quand nous nous remémorons le souvenir, nous faisons remonter les sensations, mais nous les accompagnons d’un récit intérieur (ou réel si nous parlons à quelqu’un), fait de mots.
            Lorsque nous n’avons pas rappelé un souvenir pendant longtemps, les connexions entre neurones s’affaiblissent. Nous n’oublions pas la totalité du souvenir, mais les détails ou ce qui compte moins pour nous. Nous conservons préférentiellement les aspects émotionnels, au point que des personnes qui ont subi ou vu une agression, un accident, ou toute scène traumatisante, seront obsédées par ce souvenir et auront du mal à moins y penser.
           Mais notre mémoire a des ratés : par exemple elle peut mélanger deux souvenirs et donc rendre l’une ou les deux parties inexactes. Elle peut rajouter à un souvenir des éléments faux passés ou présents. Elle peut enfin créer des souvenirs en empruntant des données à des documents, des lectures, des récits, des images vues à la télévision, au cinéma ou sur internet.
           Un chercheur a dit que les souvenirs de notre mémoire étaient comparables aux documents des archéologues sur les dinosaures : ils sont assemblés à partir d’éléments réels trouvés sur le terrain, mais ensuite interprétés et transformés pour correspondre à des situations logiques et vraisem-blables; mais personne ne sait si c’est la réalité !

           Venons en aux souvenirs de notre enfance.

           Les chercheurs disent tous qu’avant 3 ans nous n’avons pas de vrais souvenirs de notre enfance et très peu avant six ans.
          Avant 3 ans cela tient au fait que la plupart des enfants ne maîtrisent pas assez le langage et donc le discours interne n’accompagne pas  les sensations diverses.
          Après 2 à 3 ans, les souvenirs sont en général simplistes : ce sont des lieux, des personnes, des images de groupes ou de scène courtes, mais il n’y a pas en général de souvenir global. Certains souvenirs de maltraitance peuvent avoir marqué l’enfant. Nous en reparlerons dans les prochains articles.
         A partir de 6 à 7 ans l’enfant a acquis une certaine habileté dans la connaissance de la pensée d’autrui (la « théorie de l’esprit » chère aux psychologues), et une certaine indépendance vis à vis des adultes : il va à l’école et vit au milieu d’autres enfants. Il a donc des souvenirs beaucoup plus nombreux, certains émotionnels et donc il en gardera certains assez longtemps. L’accès presque systématique à la maternelle aujourd’hui, a peut être accéléré cette situation.

          Si je prends ma propre mémoire, alors que j’étais né à Pau et que je n’en suis parti définitivement que 15 ans après, j’ai passé, avec mes parents un an à Tours quand j’avais 3 ans et un an à Paris quand j’en avais 5. Je croyais avoir des souvenirs peu nombreux, mais précis, de ces deux époques, images notamment de l’endroit où nous habitions, souvenirs de promenades que je faisais avec mon grand père, de manèges ou de magasins où ma mère faisait des courses.
           Je me suis aperçu par la suite que tous ces souvenirs étaient fabriqués, qu’il s’agissait de photos prises par mes parents, de récits de mes parents et grands-parents, voire même de quelques images vues bien plus tard, à la télévision ou lors de visites à Paris. Pour des raisons que j’ignore, certains détails étaient rajoutés. Je me souviens par exemple d’habits que je n’ai jamais eus.
           Peut être ai-je quelques souvenirs des jouets que j’ai eus, mais je les ai conservés après 6 ans, même si je ne jouais plus avec eux.
            Par contre après six ans, lorsque j’ai été à l’école, j’ai des souvenirs de mes professeurs et de mes camarades, de l’école et des lieux où j’habitais, de scènes de ma vie, surtout celles qui ont compté pour moi ou de mes parents et grands parents, frères et sœur.
            Mais sont ils exacts ? A 6 ans je suis allé pendant un an dans une école , tenue par des religieuses à 100 mètres de chez moi et dont j’ai gardé certains souvenirs.
           A la fin de l’année scolaire, j’avais bien travaillé et j’ai reçu, à la distribution de prix, un beau livre de contes. Je me revois ému, montant sur l’estrade, le recevoir des mains de la Mère Supérieure, qui a écrit un mot sur la première page blanche et qui m’a embrassé. Je revois encore la scène aujourd’hui.
           Et quand j’avais 14 ans, j’ai retrouvé ce livre sur une armoire et j’ai dit à ma mère combien cela m’avait fait plaisir de recevoir ce prix. Elle m’a regardée très étonnée : «  Mais tu n’ a pas pu aller à cette distribution des prix, tu étais au lit avec les oreillons ! ». Et c’était cela la vérité.

           Alors malheureusement méfions nous de la validité de nos souvenirs d’enfance (et de ceux d’après aussi), car s’ils ont un support vrai, ce n’est pas forcément celui de notre mémoire d’alors, et nos désirs, nos sentiments ont pu les altérer et les transformer.
           De nombreux chercheurs ont fait de nombreuses expériences à ce sujet, ils ont réussi à faire intégrer de fausses données dans les souvenirs d’enfants et d’adultes et ils ont notamment constaté que ce que l’on avait envie d’avoir ou d’être influait sur notre mémorisation.
           La police et la justice savent bien que la mémoire de témoins est sujette à caution, et cela plus le temps s’est écoulé entre le fait et la déposition. La plupart des erreurs judiciaires reconnues sont dues à des erreurs dans le témoignages, faits de bonne foi, mais erronés.
         Quand la remémoration d’un souvenir peut avoir des conséquences importantes, soyons prudent et demandons nous quelle peut être la proportion de réalité exacte issue de notre mémoire, et ne prenons pas pour vrai tout ce que nous avons à l’esprit.

           

     

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