• La chimie (simplifiée) de la douleur (3)

    La chimie (simplifiée) de la douleur (3)

                  Comme tout influx nerveux, les informations de douleur passent par des synapses entre axone de divers neurones et dendrite du neurone suivant, et un neuromédiateur chimique contrôle le passage de cet influx nerveux.
                 Mais rappelons d'abord d'où partent les informations?
                 Les capteurs de douleur sont des terminaisons nerveuses libres c'est-à-dire les extrémités d'axones très arborisées, dépourvues de myéline, qui se trouvent dans tous les tissus et organes, sauf le cerveau.

              Ces "nocicepteurs" peuvent être activés par toutes sortes de stimuli qui peuvent potentiellement altérer les tissus, et pas seulement des stimulations mécaniques comme les pinçures, les piqûres ou les morsures. Des températures extrêmes, des chocs électriques, un manque d'oxygène, des expositions à des substances toxiques, peuvent également les activer.
     Si certains nocicepteurs sont plus sensibles à un type de stimulus qu'à un autre, la plupart peuvent répondre à plus d'un type de stimulus.
                Quelle que soit sa nature, le stimulus doit aussi atteindre une certaine intensité pour pouvoir activer les nocicepteurs, qui codent donc l'intensité des stimulations douloureuses en modulant leur réponse selon l'intensité du stimulus.
                Ces stimulations peuvent être directes, comme dans le cas des fortes pressions mécaniques qui déforment les membranes et déclenchent des influx nerveux. C'est par exemple la punaise qui nous pique le pied, mais sans percer la peau. Mais si la punaise perce la peau et endommage les tissus, les cellules altérées vont libérer localement certaines substances chimiques qui vont, de manière indirecte, stimuler aussi les nocicepteurs.
                En cas de stimulations fortes ou répétées, les nocicepteurs vont subir une sensibilisation, qui va abaisser le seuil de réponse, augmentant le nombre d'influx nerveux et la sensation douloureuse ainsi produite.  http://lancien.cowblog.fr/images/SanteBiologie-1/i03mdou1a.jpg

               À chacune des synapses, le long de cette voie de la douleur, plusieurs neurotransmetteurs permettent la transmission du message nociceptif. Les substances identifiées à ce jour se répartissent en deux grands groupes principaux : les neurotransmetteurs classiques de transmission des influx nerveux dont j'ai souvent parlé dans mes articles et les "neuropeptides", très grosses protéines formées de plusieurs acides aminés.             Parmi les classiques, surtout le glutamate, mais aussi l'aspartate et la sérrotonine (qui régule aussi l'humeur); quant aux neuropeptides, ils sont une vingtaine, mais le plus important est la "substance P", qui participe aussi à la régulation de l'humeur et de l'anxiété dans le cerveau.            La substance P entraîne des flux nerveux "lents" , correspondant à des douleurs lancinantes, alors que le glutamate engendre des influx rapides, consécutifs à des douleurs aigues et les signaux empruntent des fibres nerveuses différente.
                La figure ci dessous montre les réactions complexes au niveau des nocicepteurs; à noter que l'inflammation au niveau des tissus nous oblige à penser à les préserver, mais aussi nous immobilise partiellement ce qui les protège aussi.
               Certains nocicepteurs ne réagissent pas aux stimuli habituels, mais seulement aux substances chimiques produites lors d'inflammation et d'enflure.

    http://lancien.cowblog.fr/images/SanteBiologie-1/a03mdou1a.jpgLes molécules anti-douleur.

    http://lancien.cowblog.fr/images/SanteBiologie-1/i03mdou2d.jpg    
                 L'opium était sans doute déjà connu des Sumériens, environ 3 000 ans av. J.-C. comme ayant des vertus "dormitives" et analgésiques.                      
                 Ce n'est qu'en 1925 que la structure moléculaire complexe de la morphine est décrite par le chimiste britannique Robert Robinson, et à partir de 1952, il est possible de synthétiser chimiquement la morphine ou ses dérivés. Cette synthèse chimique donnera naissance à des composés de structure est proche de la morphine, (codéine par exemple), mais dont les effets diffèrent quelque peu.
                Mais notre organisme produit des opiacés endogènes, que l'on désigne sous l'appellation d'endorphines et qui sont de petites protéines (ou peptides). Elles agissent aussi au niveau de l'éveil, du stress, et du circuit de récompense.
                Parmi ces substances, les plus connues sont les "enképhalines".
                 Ces diverses substances sont piégées par des récepteurs au niveau des synapses et ils peuvent soit induire un certain blocage, soit engendrer un influx nerveux sur un neurone qui produira un signal négatif de blocage ou de diminution du signal induits par les neurones de la voie ascendante de la douleur.

                  Les récepteurs des neurones qui détectent la douleur.
                 Les nocicepteurs ont leurs propres récepteurs qui déclenchent leurs signaux nerveux. Ce sont, dans la paroi des cellules, de grosses protéines qui laissent passer certaines substances au travers de "canaux ioniques". (cylindres rouges ou bleus sur la figure)

                 On distingue trois grandes catégories, comme le montre ce schéma donné par l'université Mc' Gill de Montréal :
                              - Les protéines de la famille ENaC/DEG agiraient comme transducteurs mécaniques.                                                   
                              - Les canaux TRP (de "Transient Receptor Potential", en anglais) sont sensibles à des stimuli nociceptifs de différentes natures. Ce sont en quelque sorte des "généralistes" qui laissent entrer du calcium et du sodium dans le nocicepteur, et qui sont sensibles à la capsaïcine, créée dans les tissus par créé par l'acidité et la chaleur.
                              - À l'opposé, des récepteurs comme les ASIC (pour "Acid-Sensing Ion Channels", en anglais) sont des "spécialistes" qui ne répondent qu'à un seul type de stimulus, une acidité extracellulaire. Elle provient de cellules lésées ou encore estproduite par les muscles trop sollicités, qui produisent de acide lactique. 
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                  La compréhension du mode d'action de ces différents récepteurs intimement associés à la nociception est essentielle pour ouvrir de nouvelles perspectives thérapeutiques. En effet, les antidouleurs déjà existants comme les opiacés et les anti-inflammatoires non stéroïdiens agissent également sur des récepteurs en dehors des voies de la douleur, produisant des effets secondaires indésirables, notamment une accoutumance.            
               J'espère que ce petit cours de chimie biologique n'a pas été trop pénible.

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