• Freud, le conscient et l'inconscient (2)

    Freud, le conscient et l'inconscient (2)

        Je vous ai décrit, dans l’article d'hier comment Freud voyait l’organisation de notre psychisme et notamment de notre inconscient.
        Certes, pour les neurobiologistes actuels, l'inconscient existe, mais il est différent de la conception qu'en avait Freud.
    Il est étroitement associé à la mémoire et notament à la mémoire épisodique qui stocke les informations successives de tout ce qui nous arrive, dans l’ordre chronologique et il met en jeu tout le cerveau, lorsque les communications se font entre des centres, sans remonter au cortex préfrontal, qui perd conscience des événements et sensations


        La mémoire stocke d'abord inconsciemment pour des temps courts toutes les informations de perceptions que nous enregistrons tous les quarantièmes de seconde (voir mes précédent article sur le cerveau, la perception et lamémoire). Quand nous conduisons une voiture par exemple, nous enregistrons de nombreuses informations sur la route, sur les autres véhicules environnants, sur le bruit de notre moteur, l’évaluation de notre vitesse... ceci pour des temps assez courts qui permettent de prendre des décisions de conduite, dont certaines sont de purs réflexes quasi inconscients.
        Nous comparons volontairement certaines perceptions emmagasinées inconsciemment (par exemple du paysage), en les rappelant alors dans le cortex préfrontal pour les comparer à celles de notre mémoire et par exemple nous guider sur un itinéraire.
        Ces informations ne sont donc pas “bloquées” dans notre inconscient, mais peuvent avec un certain effort, devenir conscientes.
        Elles resteront plus ou moins longtemps dans notre mémoire puis seront éliminées pour ne pas l’encombrer.
        La plupart des images observées par nos yeux, puis enregistrées par des centres intermédiaires du cerveau sont éliminées rapidement (quelques secondes ou quelques minutes, selon leur utilité) car elles ne servent plus à rien. Nous conserverons plus longtemps certaines informations perçues presque inconsciemment (où ai je garé ma voiture dans le parking?), car il faut s’en servir au bout de quelques heures par exemple.

        Nous pouvons aussi garder en mémoire des souvenirs, par exemple des images que nous n'avons pas conscience d'avoir vues, des paroles ou des mots que nous n'avons pas le souvenir d'avoir entendues ou lus. C'est en particulier ce que l'on appelle les “perceptions subliminales” (au dessous du seuil de perception conscient) utilisées parfois par la publicité (bien que ce soit interdit) et les services secrets (associées à des psychotropes dans les lavages de cerveau).
        Les centres du cerveau mis en jeu dans ces opérations sont essentiellement les centres de perception associés à nos cinq sens, le thalamus, aiguillage de nos perception, et l’hippocampe, “professeur de la mémoire”.

        Certains souvenirs dont nous avons eu conscience sont gardés par notre mémoire, se déforment dans le temps d’autant plus que nous les rappelons peu pour nous en servir, mais ils sont d’autant mieux conservés qu’ils ont pour nous une “charge émotionnelle”.
        S'ils nous ont “traumatisés”, ils ne sont pas facilement évoqués, bien que nous nous en souvenions en faisant un très gros effort.
        C'est une sorte de refoulement, mais il n'est pas totalement inconscient, et les neurobiologiste préfèrent parler de “difficulté de rappel”, et la plupart de ces "difficultés de mémoire" ne sont pas d'ordre sexuel.
        Les difficultés de rappel peuvent être dues au choc subi. Quand j’avais 16 ans je suis rentré à vélo dans la remorque d’un camion de déménagement et suite au choc sur la tête je suis resté une heure dans le coma. Pendant quelques jours je n’avais aucun souvenir de l’accident. puis je me suis rappelé mon réveil, puis l’accident, puis au bout d’une semaine, la minute avant l’accident. C’est un phénomène connu et banal.
        Les difficultés de rappel peuvent être dues, dans le cas d’images traumatisantes, à des blocages de notre cerveau émotionnel et notamment des centres amygdaliens qui contrôlent la peur, l’angoisse, le stress.
        Ces images ont été enregistrées consciemment, mais le cerveau ne veut pas les revoir, et ceci plus ou moins inconsciemment. C’est vrai notamment des images par exemple d’attentat ou d’accident de la route, la vue de gens qui souffrent ou qui meurent. Elles sont intimement mélées à des émotions vives et traumatisantes.
        Plus proches du refoulement des mélanges de perceptions et de traumatismes graves subis nous mêmes, comme une agression non sexuelle ou un viol,
    Là si une nouvelle sensation nous rappelle inconsciemment ce traumatisme, il y a blocage, le cerveau émotionnel bloquant les ordres donnés par le cortex qui réfléchit, soit à d'autres parties du cerveau, soit à notre corps même si le cortex frontal plus ou moins conscient de cela, trouve ce blocage ridicule.
        C'est assez proche de la “censure” de Freud, mais la plupart de ces blocages ne sont pas non plus d'ordre sexuel.

        Autre phénomène, nous mémorisons des émotions, des sentiments.
    Avant de prendre une décision, notre cortex frontal compare diverses informations logiques et objectives ou bien subjectives, et le cortex préfrontal essaie de’évaluer les conséquences de nos actes, avec l’aide du cerveau émotionnel qui, se référant aux émotions et sentiments en mémoire, donne une appréciation émotionnelle avec l’aide du circuit de la récompense (voir mes articles à ce sujet).
        Une partie de ce mécanisme décisionnel est inconscient, même si l’objectif de la décision est conscient.
        Il peut arriver que le cerveau émotionnel élabore des évaluations sans que le cortex lui ait demandé consciemment de le faire et qu’il nous pousse ainsi inconsciemment à l’action.
        Il peut donc y avoir des mécanismes inconscients à l’origine de nos actions conscientes. Colère, jalousie, peur, ou divers défauts ou addictions peuvent ainsi avoir une influence inconsciente certaine sur nos actes.
       Certains neurobiologistes estiment que la plupart de nos décisions sont fortement influencées par une réflexion inconsciente et que ces éléments étant transmis au cortex préfrontal, nous avons l'impression d'une prise de décision rationnelle, alors qu'elle a été principalement subjective.
       
        Notre inconscient peut même nous “tromper” parfois en nous donnant de fausses raisons de nos actes pour nous protéger. C'est effectivement proche du “déplacement” de Freud, mais sur de nombreux sujets très divers et pas uniquement d’ordre ou d’origine sexuels.

        L'inconscient de l'enfant n'a pas plus d'aptitude que l'enfant lui même, contrairement à ce que pensait Freud et l'enfant ne peut donc, comprendre dans son inconscient, plus que ce qu'il ne comprend consciemment, en fonction de son âge.
        Freud attribuait aux jeunes enfants des pensées et des désirs d’adultes qu’ils refoulaient ensuite dans leur inconscient. Cela apparaît impossible au neurobiologiste, car le cerveau de l’enfant n’en a pas la capacité, tant au plan réflexion et compréhension qu’apprentissage et expérience.
        Le “ça” de Freud est donc beaucoup plus restreint pour le neurobiologiste

        Par contre, les neurobiologistes ne font pas d’objection à la distinction du “moi” et du “surmoi” qui sont des notions d’ordre psychologique sans que l’on puisse les relier à des mécanismes précis cérébraux.

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