• Le rôle de notre inconscient : exemples

    Le rôle de notre inconscient : exemples

                Nous avons vu hier que notre inconscient engendrait des processus d’action ou de pensée automatiques, rapides, efficaces et hors du domaine de la pensée consciente et donc dépourvus de délibération ou de planification.
              Au contraire, les processus contrôlés exigent un engagement déterminé et relativement lent de la pensée consciente.
              De façon générale, plus l’influence de l’inconscient est forte, plus le contrôle cogni-tif conscient doit être important pour la surmonter 
              Aujourd’hui nous allons donner des exemples concrets de l’action de l’inconscient.      

              1.) - « Avoir conscience de » exige de l’attention. Une expérience très connue le prouve.
              Des sujets étaient mis devant un ordinateur pour regarder une vidéo de match de basket et on leur demandait de compter les passes de ballon.  Soudain, un homme déguisé en gorille traverse le terrain en gesticulant au milieu des joueurs. Pourtant, environ la moitié des participants ne le voient pas, tellement ils sont occupés à compter les passes !

             2.) - On peut arriver à modifier légèrement le comportement grâce à des suggestions subliminales. Toutefois cela ne touche pas des processus qui demandent une réflexion importante avant décision. J’en ai parlé avant-hier et je ne reviens pas sur ce sujet

             3.) - La plupart des processus de perception sont inconscients. Le cerveau fait par exemple, toute l’interprétation des images de notre vue, sans que nous en ayons conscience. La plupart d’entre elles (tous les 1/40 de seconde) sont supprimées. Seules quelques unes pour lesquelles l’image n’a pu être identifiée et un signal d’erreur a été émis, ou qui ont suscité notre attention, remontent à la conscience.

             Supposons que nous voyons un lynx dans un buisson. Nous allons nous demander quelle bête nous voyons et le cerveau va inconsciemment comparer l’image que nous voyons à celles que nous avons en mémoire. Mais nous nous n’avons pas d’image mentale du lynx, seulement une esquisse incomplète. Nous pouvons pourtant répondre à chaque question que nous nous posons : comment sont les oreilles du lynx ? Voit-on dépasser ses canines ? Toutefois, nous n’y répondons pas en observant une image déjà présente, mais en inventant le morceau manquant au moment où nous nous interrogeons. Mais en rassemblant les réponses inconscientes à ces questions, nous allons identifier ou non ce que nous voyons pour un lynx., et là, d’un coup, nous en aurons conscience.

             4.) - Tous nos gestes subissent une préparation et une exécution inconsciente.
              Si je vous lance une balle, vous allez la suivre des yeux, calculer sa trajectoire en permanence et ajuster la position de vos mains pour la saisir à l’instant précis où elle arrive. Cela impose une préparation et une coordination en temps réel de la vue et des ordres donnés aux bras et aux mains.


              Si l’on demande à des sujets de bouger leur main droite quand ils le décideront et de repérer sur une trotteuse l’instant précis  où ils prenaient conscience de leur intention d’effectuer ce geste, l’activité de leur cerveau étant enregistrée par des électrodes, au moins 300 millisecondes avant que les participants ne prennent conscience de leur intention de bouger leur main, un signal électrique annonciateur de cette prise de conscience apparaissait dans leur cerveau, au niveau des centres de préparation prémotrice. Ils n'ont pas conscience de cette préparation qui joue par avance le scénario de l'action.
     
             Vous voulez soulever une valise assez grande. Votre cerveau crée d’abord une intention préalable et la traduit en intention motrice. Toutefois, le contenu précis de cette intention (à quel moment précis vais-je prendre la valise ? Quelle force vais-je déployer ?) est en grande partie inconscient. 
              Soudain, vous voyez que la valise se soulève beaucoup trop haut, parce que le réseau vue/centres prémoteurs, qui simule l’action, avait inconsciemment supposé, sur la base d’indices visuels, que la valise était pleine, et avait formé une intention inconsciente de soulever une valise d’un certain poids. C’est à ce moment, et pas avant, que vous prenez conscience de votre intention de soulever une valise lourde.

           Le réseau compare le résultat de la simulation de mouvement aux conséquences sensorielles réelles de l’action, qui diffèrent de la prévision. Un message d’erreur, qui favorise la prise de conscience de ce qu’était votre intention non consciente, est créé. Vous prenez alors conscience du fait que l’intention n’était pas adaptée à la situation et mettez en place une stratégie plus efficace. 

             Des chercheurs ont excité, chez des volontaires, l’aire motrice primaire (qui exécute le mouvement du bras, mais n’est pas le siège de l’intention), au moyen de champs magnétiques, pour que leur doigt appuie sur un bouton, sans qu’ils aient déclenché ce geste.  Les sujets n’ont été conscients de leur geste que 300 ms plus tard, temps mis pour que l'information parvienne au cortex préfrontal.

              5.) - La plupart des règles implicites permettant au cerveau d’effectuer des tâches automatiquement sont apprises peu à peu par apprentissage.
              C’est le cas du contrôle des gestes et des mouvement que le bébé acquiert peu à peu, puis de la lecture et l’écriture qui deviennent peu à peu automatiques (on ne réfléchit qu’au contenu du texte), ou de la frappe sur un clavier ou un piano, pour la pratique de la plupart des sports, et même pour la conduite automobile, où le cortex frontal n’est appelé à l’aide que sur un message d’erreur, quand il y a un incident non prévu.

             6.) - L’inconscient est à l’origine de nos émotions, qui ne sont pas provoquées volontairement mais proviennent du fond de nous mêmes (notamment sous l’influence des centres amygdaliens) et il a ensuite une influence sur leur traitement conscient.
              Des études ont montré que le souvenir d’un incident au cours duquel on a blessé quelqu’un pousse à aider autrui (une façon de compenser cet acte répréhensible). Plus étonnant : le simple fait de se laver les mains entraîne la disparition de la culpabilité !
               Lorsque l’on demande à quelqu’un de donner un avis sur son existence, l’appréciation est statistiquement meilleure s’il fait beau que s’il fait mauvais et cette différence cesse si on attire son attention sur le temps qu’il fait dehors.

             7.) - L’inconscient peut avoir des règles discutables et il est à l’origine de nos préjugés.
              Dès que nous apercevons quelqu’un, une première impression se dessine avant même que nous n’ayons commencé à lui parler. Nous lui associons inconsciemment un comportement et une personnalité, même si nous ne disposons que d’informations très limitées. Nous nous attendons à ce que ce comportement soit en accord avec ce que nous imaginons de son statut social, de son métier….
              Dès que nous rencontrons un inconnu, nous notons la couleur de sa peau, son sexe, son âge – caractéristiques qui, une fois perçues, se connectent automatiquement à des stéréotypes sur la façon dont les membres de ce groupe.
               Les comparaisons que nous faisons du comportement des autres se réfère souvent à des sensations : on évalue quelqu’un comme plus « chaleureux » ou plus « froid ». 

              8.) - L’être humain a tendance, dès son plus jeune âge, à imiter autrui. C’est une des conditions de l’apprentissage inconscient.
              Adopter inconsciemment les postures et divers comportements de ses interlocuteurs est une sage stratégie, surtout quand on ne sait pas bien comment se comporter dans telle ou telle situation et cette attitude améliore la vie sociale, mais, poussée trop loin, elle devient un esprit moutonnier, qui nous entraine inconsciemment dans des actions..


             Des chercheurs américains ont fait « élire » fictivement des candidats d’autres Etats, qu’ils ne connaissaient pas, uniquement sur la vue de photographies. Ils ont été très étonnés de trouver des chiffres voisins des votes réels, ce qui montrait sans doute une influence inconsciente de la physio-nomie des candidats sur le votes, pourtant en principe rationnels.

              9.) - Le fonctionnement de notre mémoire est en grande partie inconscient parce que très automatisé.
              Certes au départ le cortex préfrontal va indiquer consciemment qu’il s’intéresse à cet évènement ou cette pensée et qu’il faut la mémoriser, ou bien il demande de rappeler un souvenir. Mais son rôle conscient se limite là.
              La consolidation du souvenir, la mémorisation des adresses des neurones concernés dans l’hippocampe, le rappel du souvenir, tout cela se passe en mode automatique, totalement inconscient. L’influence aussi du sommeil sur la conservation des souvenirs, de même que celle des centres amygdaliens sur les souvenirs ayant une connotation émotionnelle, sont aussi des automaatismes
              Le réenregistrement du souvenir après consultation avec des ajouts et des suppressions est aussi totalement automatique, de telle sorte que nous ne nous apercevons pas des transformations souvent inexactes qu’il subit.

              10.) - L’inconscient intervient en permanence dans nos actes raisonnables et nos décisions. On le rencontre en particulier dans le domaine de l’intuition.
           
      Vous étudiez un problème et en vain car la solution n’était pas là.
             
    Vous étiez désarmé, mais vous avez tout à coup une révélation et les chemins logiques apparaissent brutalement dans leur évidence, la preuve n’attendant plus qu’à être écrite. Cela suggère fortement que votre inconscient a continué, en tâche de fond, à travailler sur le problème, en collaboration avec votre mémoire. Et, la solution trouvée, il l’a envoyée à la conscience, qui y a vu une évidence. 
                 Le travail qui se déroule en arrière-plan ne se fonde pas sur des règles logiques, n’est pas une réflexion à proprement parler. Notre inconscient produit plutôt des liens et des analogies de manière automatique. Au final, il ne nous envoie pas une solution clé en main, mais nous lance sur une piste de recherche ou nous indique un résultat possible, que nous tâchons de valider rationnellement après coup, de façon consciente. 

     Nota : la plupart des exemples de cet article proviennent de la lecture d'articles des revues  "Pour la Science" et "La Recherche"

     

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