Je rappelle d’abord ce que je vous ai déjà expliqué dans d’autres articles, qu‘une information est subliminale lorsqu’elle est au dessous du seuil de perception consciente de notre cerveau (principalement vision et audition) et que donc nous n’en n’avons pas conscience.
Au dessous d’un autre seuil minimal, plus bas, elle ne peut plus être perçue du tout par nos sens, mais au dessus de ce seuil minimal mais en dessous du seuil de perception consciente, nos sens perçoivent l’information, mais de façon inconsciente. (on parle de “perception subliminale”)
Le problème est de savoir dans quelle mesure le cerveau la traite quand même et donc si une telle perception subliminale peut néanmoins nous influencer.
J’entendais l’autre jour au journal télévisé parler de la campagne présidentielle américaine et des irrégularités que l'on reprochait à Donald Trump dans ce domaine.
Ce n'est pas nouveau dans les campagnes présidentielles américaines, et il faut se rappeler la campagne présidentielle de 2000, qui avait été le théâtre d'un débat enflammé sur l'effet potentiel des images subliminales à la télévision, dont avait été victime l’américain Al Gore, qui a été vice-président de Bill Clinton et qui est un passionné d’écologie, chose rare aux USA.
Les partisans de son adversaire Georges Bush avait réussi à faire projeter de façon périodique, pendant les discours d’Al Gore à la télévision, le mot “rats”.
Les téléspectateurs ne pouvaient pas l'apercevoir, car le temps d'exposition (30 millisecondes) était insuffisant pour que le mot soit accessible à la conscience.
Néanmoins, les adversaires de G. Bush et partisans d’Al Gore ont allégué que la perception, même inconsciente, d'un tel mot, pouvait susciter un malaise ou une peur diffuse qui restait associée à AI Gore et faussait les élections;.
Devant la fureur déchaînée par cette affaire, Joel Weinberger de l'Université de NewYork, a projeté à ses étudiants de courts messages télévisés pour l'élection d'un délégué, en insérant des images subliminales représentant, soit le mot “rats”, soit le mot “star”,qui est l’anagramme de rats, soit l'inscription dépourvue de sens “xxxx”. Des questionnaires ont ensuite été distribués aux 240 participants, qui devaient noter diverses qualités des candidats : honnêteté, compétence, etc.
J. Weinberger a constaté que, si les participants appréciaient un des candidats avant l'expérience, l'inscription “rats” n'avait pas d'effet. En revanche, lorsqu'ils étaient indécis, l'inscription faisait légèrement baisser les notes attribuées pour l'honnêteté ou la compétence alors que l’inscription “star” les favorisait légèrement..
La polémique avait fait se souvenir qu’en 1962, un chercheur en sciences du marketing, James Vicary, a révélé qu’ en 1957, il avait, à des fins commerciales, favorisé les ventes de Coca-cola en projetant des slogans « Buvez du Coca-Cola » de façon subliminale durant la projection des films à la télévision.
Il est connu également que les Russes et les Vietnamiens se sont servi de telles méthodes, associées à des psychotropes, pour faire des “lavages de cerveau” de leurs prisonniers.
Apparemment, les mots subliminaux ont un effet sur le psychisme et le comportement, mais il en manquait à l’époque, une preuve biologique.
Différentes équipes ont montré que l'on perçoit de façon subliminale des objets et des nombres. Concernant les mots, il a été établi que le cerveau perçoit leur structure de façon inconsciente, mais on n'était pas certain qu'il déchiffre leur sens.
Plus récemment, les neurobiologistes Lionel Naccache et Raphaël Gaillard de l'Hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris (unité INSERM 562), ont montré que l'on est également sensible au sens émotionnel d'un mot montré de façon subliminale.
Chez des patients nécessitant une opération du cerveau, à qui ils avaient implanté des électrodes dans les centres amygdaliens, (qui s'activent notamment lorsque l'on reconnaît l'émotion exprimée par un mot et qui sont à l’origine des réactions de peur), ils ont présenté des mots pendant 30 millisecondes, ce qui les rend inaccessibles à la conscience... et notamment le mot "danger" a activé les centres amygdaliens, ce qui montre que le cerveau a reconnu la peur, émotion exprimée par le mot danger.
Si l'impact des images subliminales est avéré, on ignore pour le moment, pendant combien de temps il s'exerce. Diverses expériences ont suggéré que l'effet physique des messages subliminaux ne dure que 150 millisecondes, mais on ignore ensuite quel sort leur réserve notre mémoire inconsciente. Si vous êtes assis dans le métro et qu'un mot d'une affiche publicitaire atteint votre rétine sans que vous n'en ayez conscience, il est possible que cet effet se prolonge pendant tout le voyage.
L'affirmation "je ne crois que ce que je vois" est décidément ambigüe.