» Hier j'ai rappelé les notions élémentaire concernant l’ADN, les acides aminés, les protéines et leur action essentielle dans la formation et le fonctionnement des organismes vivants.
Aujourd’hui, nous allons voir comment on peut agir sur l’ADN, ce qui constitue la transgénèse et créer ainsi des « organismes génétiquement modifiés » (OGM).
Nous verrons par la suite les domaines dans lesquels on utilise ces techniques, les progrès qu’elles suscitent, mais aussi les risques et inconvénients, qui sont différents si on utilise des bactéries transgéniques en vase clos, des plantes OGM dans la nature, ou si l’on clone des êtres vivants
On ne va pas transférer un gène sans raison, ce serait inutile et dangereux.
il est donc nécessaire de faire au départ des études complexes, qui détermineront les propriétés des gènes, c’est à dire à quoi ils servent, quelles sont les actions qu’ils entraînent dans l’organisme. En général on part de l’action qu’on voudrait provoquer et on remonte à la ou les protéines qui vont engendrer cette action et on cherche ensuite le gène qui code la production de cette protéine.
On peut ainsi déterminer quels sont les gènes qui pourraient avoir de l’intérêt, dans un domaine donné, en matière de transgénèse et qui seraient responsables de la caractéris-tique que l’on veut transférer.
Il faut ensuite isoler ce gène que l’on veut transférer et faire une construction génétique, (on l’appelle aussi transgène ou gène chimère), qui consiste à lui adjoindre des éléments biologiques, qui lui permettront de fonctionner normalement et sans lesquels il ne serait qu’une molécule chimique morte, sans action possible.
On va ensuite insérer cette construction dans un vecteur que l’on appelle un « plasmide », qui est un bout d’ADN souvent circulaire, et en provenance le plus souvent d’une bactérie, qui comporte donc le gène concerné, et que l’on va insérer dans l’ADN de l’organisme vivant que l’on veut transformer.
Il va falloir ensuite introduire ce vecteur dans l’organisme cible. Le vecteur est très souvent un virus auquel on a enlevé le caractère pathogène, mais on utilise aussi des procédés mécaniques (comme la projection de petites billes métalliques contenant le plasmide concerné).
Cet ADN va se reproduire avec la modification génétique que l’on a introduite, créant ainsi un organisme ayant un ADN différent de l’original. Le gène a été « cloné »
Toutefois la transformation ne sera efficace que si la construction génétique de départ est telle que le gène transféré puisse s’exprimer au sein de cet organisme, ce qui a nécessité la maîtrise de nombreuses difficultés.
Premier exemple : production d’un médicament :
Prenons pour exemple l’utilisation de « Escherichia coli » ou « Colibacille », qui est une bactérie habituellement présente dans le gros intestin et non pathogène (sauf cas particuliers où elle envahit les voies urinaires), et qui a la particularité de se reproduire avec une vitesse impressionnante. (Dans les conditions optimales, chaque cellule se divise en 2 toutes les 20 minutes environ. C'est ainsi qu'en moins de 2 jours, 1 seule bactérie pourrait produire, si elle disposait d'une quantité suffisante de nourriture , une masse de 6 x 1021 tonnes, égale à celle de la Terre !).
Escherichia coli mesure environ 2 µ (microns ou micromètres) et pèse 10-12 g. C'est une cellule sans noyau véritable, mais possédant tous les éléments nécessaires à la synthèse des protéines, c'est-à-dire un chromosome de 1 mm de long, comportant environ 4 000 gènes et de nombreux ribosomes.
Supposons que l’on veuille fabriquer un médicament, par exemple de l’insuline.
(voir schéma ci dessus).
L’insuline est une grosse protéine qui régule notre taux de sucre dans l’organisme et qui est sécrétée par notre pancréas. Ce fonctionnement est déficient chez certains malades et on leur injectait de l’insuline produite par des.pancréas de porcs, mais qui est difficile à purifier et mal tolérée par l’organisme.
On a donc cherché à la produite par transgénèse.
On va extraire de l’organisme humain, le gène codant la synthèse de l’insuline.
On va parallèlement extraire un plasmide de bactéries Escherichia coli que l’on ouvre pour faire la place pour le morceau d’ADN qu’on veut lui ajouter
On assemble les deux et on réinsère le plasmide dans le colibacille.
Dans un réacteur, on fait se multiplier la bactérie, et les milliards de bactéries ainsi produites vont synthétiser de l’insuline.
Il faut évidemment avoir également étudié et mettre en oeuvre un procédé physico-chimique de séparation du médicament et de la bactérie, et de purification de l’insuline.
Deuxième exemple : fabrication d’un végétal ou d’une graine) OGM :
Le premier stade est le même que ci dessus, avec évidement une protéine adaptée à la place de celle produisant l’insuline, mais Escherichia coli n’est pas une bactérie propre aux végétaux. On ne va donc pas réintroduire le plasmide dans la bactérie.
On va les déposer sur de petites billes de tungstène que l’on projette grâce à un canon à particules. On force ainsi l'ADN modifié à traverser la membrane épaisse des cellules des végétaux. Cette technique est appelée « biolistique » (au lieu de balistique).
Une autre solution consiste à utiliser, à la place du colibacille un plasmide d'une bactérie du genre « agrobactérium », qui possède un système naturel de transfert de gènes aux cellules végétales. L’ADN de ce type de bactérie, contenu dans le plasmide, a la propriété de ne s'exprimer que dans la cellule végétale.
On réinsère donc le plasmide modifié génétiquement dans la bactérie et on cultive ces bactéries avec les cellules végétales dont la plupart acquerront alors la modification génétique et la reproduiront.
Troisième exemple : transgenèse animale :
Pour effectuer des études de mécanismes biologiques en laboratoire, on veut modifier le patrimoine génétique de souris et produire une ligné OGM pour les expériences à mener.
Trois processus peuvent être utilisés :
On injecte directement les gènes dans les œufs au moment de la fécondation in vitro. Le processus est alors schématisé ci dessous avec comme exemple une étude où l’on voulait transférer dans la souris le gène humain de l’hormone de croissance.
Les pourcentages de réussite (animaux qui possèdent le transgène dans toutes leurs cellules) est faible, de l'ordre de 10 à 30% pour les souris. Il est bien moindre pour d'autres espèces sur lesquelles on a essayé la transgenèse.
On essaie de transférer les gènes dans les gamètes. Les résultats sont pour le moment peu probants.
Plus récemment, on les introduit dans des lignées de cellules souches embryonnaires ou cellules ES (le plus souvent) ou dans des lignées de cellules germinales qui précèdent les gamètes (rarement).
Cette technique est relativement efficace mais très complexe et le temps entre la mise en culture de cellules souches, leur modification génétique, la sélection des clones à traiter, l’obtention de chimères fertiles et leur reproduction peut s’avérer relativement long.
J’exposerai demain une application un peu différente : la thérapie génique, en même temps que diverses applications pratiques de la transgénèse..