La revue « Pour la Science » a publié en décembre 22 un numéro spécial sur les « pôles ». Il montre notamment que l’Arctique se réchauffe deux à trois fois plus vite que le reste du globe.
On sait que la fonte de la glace sur le sol augmentera le niveau des mers de près d’un mètre en 2100.
Un autre conséquence moins connue, l’effet sur les jet-streams, les courants à haute altitude, qui influencent la météo de l’hémisphère Nord.
Cet effet est décrit sur le schéma ci-dessous.
Mais ce qui m’a le plus intéressé est un article sur l’exploitation des fonds des ocans autour de l’Arctique, ce qui suscite de bagarres entre pays riverains.
Ni la presse si la télé n’en parlent.
Voici ce qu’en dit « Pour la Science »
Autrefois, les Nations considéraient que les océans n’appartenaient à personne.
Dans les années 1600, le droit de police et de règlementer la circulation a été accordé jusqu’à trois milles marins des côtes (4,8 kilomètres ; la plus longue distance d’un tir de canon,).
En 1982, pour fixer des règles, plus de 160 pays ont signé la convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM). La souveraineté d’un. Etat côtier est fixée à 12 milles marins ( 22 224 mètres). Au delà se trouvent les eaux internationales ou la « haute mer », où la circulation est libre.
Mais la Convention stipule également qu’un Etat bordant l’un des océans de la planète possède une zone économique exclusive, ou ZEE, qui s’étend а 200 milles marins (370,4 kilomètres) au large de son littoral. L’Etat a alors tous les droits sur les ressources marines et sous-marines de cette zone.
En outre un Etat peut établir des droits souverains d’exploitation des fonds marins au-delà de 200 milles marins s’il est capable de présenter des preuves géologiques détaillées prouvant que son plateau continental –( le plancher océanique en pente douce qui se prolonge du rivage jusque loin dans l’ocйan avant de plonger dans la mer profonde) – s’étend au-delà de la ligne des 200 milles. Toutefois cela ne concerne pas alors le droit de pèche.
Une Commission des limites du plateau continental (CLPC), organe des Nations unies est chargé d’examiner les requêtes de délimitation des Etats côtiers et de déterminer si la science a été correctement appliquée.
Jusqu’en 2000, les Etats du littoral arctique ne s’étaient pas intéressés à ce problème. Mais en 2008, une étude de l’institut d'études géologiques des Etats-Unis a conclu que les sédiments de l’Arctique pourraient contenir 30 % du gaz naturel et 13 % du pétrole qu’il reste а découvrir dans le monde; de prйcieux minéraux de fer et de terres rares y reposeraient aussi. Le retrait de la glace de mer a permis d’ouvrir et d’exploiter des voies de navigation. Bref un beau fromage pour les pays riverains : Etats-Unis, Canada, Russie, Chine, Danemark et Groenland, Norvège.
Déjà la Russie avait élaboré un premier dossier succinct en 2001; la Norvège avait soumis un dossier complet à la Commission en 2006; le Danemark a élaboré un énorme dossier en 2014, et la Russie a complété son dossier en 2015; En 2021 le Canada a réalisé in dossier de 2 100 pages de textes, de coordonnées et de mesures provenant de sonars multi-faisceaux, gravimètres et carottes, et les Etats-Unis vont déposer le leur. La Chine a fait savoir qu’elle s’intéressait à la question (la route de la soie polaire)..
Bien entendu, comme le montre le graphique ci-dessous, les territoires revendiqués se chevauchent et la Commission va mettre plus d’une dizaine d’année pour régler les litiges; et accorder les revendications du fond marin implique des compromis politiques et scientifiques.
Le travail de la commission ne sera pas facile car le texte de l’accord prescrivait qu’un pays pouvait revendiquer au delà de son plateau océanique, sur une « dorsale » le longeant. Or il existe, au milieu de l’Arctique, la « dorsale de Lomonossov » entre le Danemark, la Russie et le Canada; qui s’étend sur 1 800 kilomètres des côtes de Nouvelle-Sibérie jusqu’à l’îe canadienne d’Ellesmere, juste а côté du Groenland, et divise l’océan Arctique en deux. Certains de ses sommets s’élèvent а 3 500 mètres des fonds marins. (voir photo ci-dessous, la dorsale est la ligne blanche).
Je cite la revue Pour la Science « La dorsale est une gigantesque relique datant de millions d’années, lorsque les continents d’Amérique du Nord et d’Eurasie, alors voisins, ont commencé а s’éloigner en pivotant l’un par rapport à l’autre, déformant le plancher de l’océan Arctique en expansion. Cet héritage commun signifie que le Danemark, la Russie et le Canada peuvent tous trois prétendre que la dorsale s’étend а partir de leurs plateaux continentaux et tracer le contour d’un territoire le long de cette dorsale pour se l’approprier. L’endroit le plus remarquable inscrit dans ces contours ? Le pôle Nord. »
Derrière l’aspect économique se cache un intérêt militaire, notamment pour la Russie à qui la côte arctique offre une position militaire stratégique, notamment en termes de dissuasion nucléaire, car elle abrite d’importantes bases nucléaires sous-marines.
Bref de longues négociations seront nécessaires;