• Les hallucinations sensorielles

    Les hallucinations sensorielles


              Lorsqu’on parle d’hallucinations il faut bien distinguer celles, sensorielles et perceptives, qui correspondent à une stimulation des centres d’interprétation de nos sens (on les appelle “psychosensorielles” et elles relèvent de la neurologie), et celles qui ont un caractère psychique qui relèvent de la psychiatrie.
              Alors que l’hallucination psychique échappe au contrôle de la logique et à toute attitude critique et donc à la conscience de la personne, au contraire, les hallucinations sensorielles touchent en général des individus dont la personnalité et la structure mentale sont normales et qui ont une attitude critique et se plaignent de ces phénomènes, dont ils ont conscience.
              C’est de ces hallucinations sensorielles que nous parlerons aujourd’hui.
       

              Le contenu des hallucinations sensorielles est extrêmement divers . Il peut s'agir d'hallucinations élémentaires (couleurs, lumières, points, quadrillages. cercles, bruits indéfinis, grondements, vibrations. sensations de picotement ... ) ou d'hallucinations élaborées (animaux, paysages, paroles, chants. sensation de main qui nous agrippe, odeur d’alliments ... ). Les différents éléments du contenu et leur agencement spatio-temporel, peuvent être, comme dans le rêve, plus ou moins logiques ou incongrus.
              La fréquence d'apparition et la durée d'une hallucination varient notablement: intermittente et brève, ou chronique et persistante. La personne est souvent parfaitement capable de distinguer l'hallucination d’une scène réellement perçue, mais, dans certains cas - très rares - confond hallucination et perception. (surtout au réveil quand le cortex préfrontal n'est pas complètement en action.

              Les hallucinations visuelles se manifestent par des éclairs de lumière et couleurs, des motifs, et des  formes plus organisées, telles des figures géométriques.
              Elles se produisent aussi bien les yeux ouverts que les yeux fermés. Lorsque les yeux sont ouverts, des motifs élémentaires peuvent être combinés avec des éléments de la scène environnante. La forme, la taille, la perspective, la brillance et les couleurs des éléments présents dans le champ visuel sont déformées. Les objets semblent parfois animés de mouvements de pulsation périodique.
              Avec les yeux fermés, le sujet peut aussi avoir l'impression de voir des objets, des paysages, des êtres fantastiques, des scènes complexes.
              Dans certains cas très rares les hallucinations visuelles peuvent être si intenses que la personne ne voit plus du tout la scène environnante, bien que ses yeux demeurent ouverts.
              Mais il faut signaler qu’il existe des phénomènes qui ne sont pas vraiment hallucina-toires  mais des excitations de neurones des centres d’interprétation visuelle dues à des conditions anormales de leur environnement chimique, ou de véritables perceptions de “points” en mouvement provoquées par des hétérogénéités de l’humeur vitrée qui se déplacent.(le liquide visqueux à l’intérieur du globe oculaire.)

              Quant aux hallucinations auditives, autres que la perception de voix dont je parlerai demain, il s'agit sons simples (bourdonnements, grondements, frottements, coups, sifflements, bruits mécaniques), mais aussi de sons complexes (eau qui coule, cloches, claquement de porte, chute et bris, chuchotements, gémissements, bruits de pas, musique).
    Elles peuvent être localisées dans l'espace ou sembler provenir de l'intérieur de soi-même.

              Il existe aussi des hallucinations touchant l'odorat et le goût, fortement liées, l'odorat jouant un rôle crucial dans l'appréciation gustative.
    A titre d’exemple des odeurs de putréfaction et de décomposition, de pneus brûlés, de rose, de cannelle: des goûts d'huîtres, d'oignons, de métal ou encore de sang.
              Je n’ai pas vu cités, dans les études que j’ai lues, l’odeur de « sainteté » et le goût du “luxe” LOL

              Les hallucinations kinesthésiques concernent le sens qui nous renseigne sur la position du corps, la posture, l'équilibre et le mouvement, à la la capacité à percevoir la posi- tion, l'orientation et le mouvement des membres et du tronc (proprioception), et au système vestibulaire de l’oreille (les capteurs de la gravitation situés dans l'oreille interne).
              Une hallucination kinesthésique se manifeste par une simple sensation de tremblement, ou par l'impression d'être situé sur un disque rotatif, la sensation de s'enfoncer dans le sol ou de s'élever dans les airs, de distorsion et d'élongation des membres, de membres surnuméraires ou manquants.
              Une des illusions les plus connues de ce type d'hallucination est celle des membres fantômes que ressentent certaines personnes amputées, qui ont l'impression d'avoir encore en place, la jambe ou le bras perdu.

              Enfin, à la frontière avec les hallucinations psychiques, la sensation de présence de quelqu'un près de soi. Les personnes décrivent une présence, ressentent le souffle de sa respiration, l'entendent se déplacer, sentent son odeur ou ont la conviction d'une présence. Cet « intrus » semble souvent imiter les mouvements et postures de la personne elle-même. Ce type d'hallucination soulève la question du double, miroir de la conscience de soi.

              De nombreux phénomènes hallucinatoires mettent en jeu plusieurs modalités sensorielles.
              La personne peut se voir “de l'extérieur” (autoscopie) Par exemple, le sujet a la sensation d'être sorti de son corps (ce qui met en jeu une hallucination kinesthésique) et de s'observer lui-même depuis une position spatiale élevée (hallucination visuelle).
    On a observé que la stimulation électrique directe d'une petite aire cérébrale (la jonction temporo-pariétale) déclenche chez certains sujets des expériences autoscopiques ainsi que diverses illusions vestibulaires. Ces phénomènes intéressent les neurosciences car ils constituent une voie d’étude du sens de soi, du schéma corporel et même de l'empathie. Leur étude s'appuie aujourd'hui sur les techniques d'imagerie cérébrale ainsi que sur la réalité virtuelle (simulation sur ordinateur du monde réel).

              Enfin un cas particulier qui n’est pas une hallucination : la synesthésie.
    Je connais un jeune homme qui, lorsqu’il voit un chiffre, le voit toujours “en couleur”, rouge pour le 2, bleu pour le 8,. et il sent en même temps des odeurs différentes selon le cas : chocolat ou camembert.
              Même si ses caractéristiques peuvent se rapprocher d'une hallucination, la synesthésie s'en distingue tout d'abord par son caractère chronique, indépendant de tout mode d'induction.
              Elle se traduit par une correspondance précise et stable à travers le temps, entre les représentations impliquées des divers sens.
              Les personnes concernées ne s'aperçoivent généralement que tard dans leur vie, de cette particularité alors qu’une telle caractéristique de mélange de sensations est assez répandue (quelques % de la population).
              Il ne s’agit pas d’hallucinations véritables mais probablement de connexions entre certains neurones qui servent à la mémorisation de ces caractères et ceux concernant celle des couleurs ou des odeurs, pour le jeune que j’ai cité, connexions qui auraient dû normalement être éliminées naturellement dans l’enfance..
              Alors que les hallucinations résulteraient d'un affaiblissement de certains mécanismes cérébraux inhibiteurs, (par exemple à cause d'une prise de drogue), la synesthésie aurait donc plutôt des caractéristiques structurelles physiologiques. Une étude fonctionnelle en imagerie par résonance magnétique, a montré que dans le cas de personnes, ayant comme le jeune garçon, des correspondances symboles graphiques - couleur, la perception de chiffres entraine effectivement l'activation chronique d'une région de la mémoire proche, sélectivement activée par la perception de couleurs. De même, une récente étude anatomique faite au CEA-INSERM, a montré que chez des synesthètes, pour lesquels les intervalles musicaux (quinte, tierce ... ) déclenchent des goûts et odeurs précis, les fibres cérébrales situées à l'interface des cortex auditif et gustatif sont particulièrement denses.
    Ces résultats confortent l'hypothèse d'une base biologique de la synesthésie.

              Je vous parlerai demain des personnes qui "entendent des voix (comme Jeanne d'ARC).
     
     
     

     

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 5 Juillet 2019 à 13:51

    Tout est très bien expliqué. Je vous en remercie de nous faire partager ces écrits.

    Bonne fin de semaine ! Ghislaine.

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