• Les atomes "super lourds"

    Les atomes "super lourds"

                  Depuis longtemps les chimistes (par exemple Lavoisier), cherchaient à classer logiquement les éléments, en rapprochant leurs propriétés chimiques, et c’est en 1860 que Dimitri Mendeleïev a élaboré le tableau très proche de l’actuel, dont je vous ai parlé hier, en se basant sur une périodicité des propriétés chimiques.
                De nombreux corps simples n’étaient pas connus à l’époque (la radioactivité et les isotopes non plus), mais il avait fait le pari que des corps seraient découverts et il leur avait laissé des places vides. Cette géniale intuition s’est révélée exacte.
                Le tableau de Mendeleïev allait alors jusqu’au numéro 118 (le nombre de proton du noyau)  mais on ne pensait pas pouvoir obtenir des éléments tellement ils étaient prévus instables.
                  Quand j’ai fait mes études il y a plus de 75 ans, on connaissait, si je me souviens bien, que jusqu’à l’élément 97 le Berkelium Bk qui est un des actinides radioactifs et déjà instable. Le suivant 98, le Californium a été découvert en 1950 en bombardant une cible de Curium 95 avec un faisceau de particules alpha (noyaux d’hélium). Le Californium est un émetteur de neutrons et il est dangereux. Il fissionne sous l’effet des neutrons et on pourrait théoriquement en faire une bombe, mais il est impossible d’en préparer des quantités suffisantes.
                 Les éléments suivants ont peu à peu été découverts, et à partir du numéro atomique 104 (le rutherfordium, on pénètre dans le domaine des éléments dits « superlourds », que l’on appelle aussi les « transactinides », d’un numéro atomique supérieur à celui du lawrencium (103), le dernier des actinides.

                  Après le Rutherfordium (104), viennent le Dubnium (105), le Seaborgium  (106), le Bohrium  (107), l’Hassium (108), le Meitnerium (109), le Darmstadtium (110), le Roentgénium (111), le Copernicium (112), le Nihonium (113), le Flérovium (114), le Moscovium (115), le Livermorium (116). (voir tableau ligne 7).
                 L’élément 118,  l’Organesson a été « vu » et découvert avant l’élément 117, vers 2005, en projetant du calcium (20) sur du californium (98). mais seuls 4 atomes avaient été détectés, tellement il est instable .
                L’élément 117, le Tennessine a été découvert par des physiciens russes en 2010 (en projetant des ions Calcium (20), sur du Berkélium (97), et  cette découverte  a été confirmée par les américains.
                 Les chercheurs essaient toujours de bombarder des atomes dans des accélérateurs, avec un faisceau d’ions lourds (dans ce cas, de gros noyaux atomiques dépourvus d’une partie de leurs électrons) dans l’espoir de surmonter la répulsion électrostatique entre deux noyaux chargés positivement et de les forcer à fusionner, pour essayer d’obtenir les éléments des numéros 119 et 120, sans succès pour le moment. Soit ils les découvriront un jour, soit ils seraient trop radioactifs et se détruiraient trop rapidement, soit ils n’existeraient pas. Il serait probablement nécessaire de disposer de faisceaux d’ions plus puissants pour obtenir des résultats plus probants.

                  Lors de ces expériences en laboratoire, on envoie un faisceau  d’ions vers une cible, et la plupart des ions traversent la cible sans interaction, mais les débits sont énormes : 6. 1012   parti-cules par seconde et on a donc quelques collisions provoquant des fusions, mais l’ion fusionné se déplace à presque un million de mètres par seconde. Il faut le ralentir par de l’hélium (ou d’autres gaz pour réagir chimiquement), et dans des champs électriques, pour essayer de mesurer des propriétés de l’élément créé. Mais s’il est trop instable, il se désintègre et disparait avant qu’on ait pu faire des essais. L’élément le plus lourd que les physiciens ont pu étudier est le flerovium (114), car les éléments suivants n’ont pas été créés en assez grande quantité parce qu’ils ont des durées de vies trop courtes.
               On ne savait pas si le Flérovium se comportait comme un gaz rare ou comme un métal. Les dernières expériences de 2022 ont montré qu’il se liait à l’or à température ordinaire et à la température de l’azote liquide (- 196 d°C), mais pas aux températures intermédiaires.
               Il semble que l’Organesson, qui d’après sa position dans le tableau, devrait être un gaz rare, serait plutôt solide.
               On ne sait pas expliquer ces propriétés bizarres. Il semble que ce soit dû à des effets quantiques. En effet, plus un noyau est lourd, plus les électrons sont attirés près du noyau. L’espace, dont les électrons disposent pour circuler, est donc plus faible et leur vitesse augmente  et s’approche de la vitesse de la lumière. Ce sont alors les lois de la mécanique quantique qui s’appliquent, ce qui a des conséquences bizarres sur les propriétés de l’élément, qu’on ne sait pas expliquer.

                Une autre direction d’étude est de rechercher si de tels éléments existent dans l’Univers, car ils pourraient se former lors de la collision d’étoiles à neutrons, qui permet à certains noyaux de capturer les protons et neutrons qui l’entourent et devenir ainsi des « atomes lourds ».
               Les astronomes ont détecté dans des étoiles, des teneurs anormales d’éléments plus légers (autour du numéro 45), qui pourraient provenir de la désintégration d’éléments lourds.

                Une dernière direction de recherche est de créer des éléments lourds sans changer leur numéro atomique, mais en les chargeant en neutrons et donc en créant des « isotopes lourds ».
                 Une équipe japonaise a observé de l’oxygène 828, au lieu de O816, qui contient 20 neutrons au lieu de 8. Il est très instable et va éjecter des neutrons dans les secondes qui suivent sa création..
                 On trouve aussi des isotopes avec un nombre plus faible de neutrons.
    Les atomes "super lourds"             Ainsi en bombardant des atomes de Béryllium, avec des faisceaux d’isotopes de l’Oxygène, des chercheurs américains ont mis en évidence des atomes d’azote (7), qui ne contenaient que 2 neutrons au lieu de 7 (donc 5 de moins).
                 Au sein d’un noyau, les protons chargés positivement se repoussent. Les neutrons viennent augmenter la force de liaison forte entre particules, qui compense la répulsion des protons. Si le nombre de neutrons devient trop faible, cette répulsivité n’est plus compensée et l’atome devient instable et éjecte des protons.
                 Ainsi l’azote N79 , tend à éjecter ses protons le uns après les autres et se désintègre en Carbone (6), puis en Béryllium (4), puis en  Hélium (2). (figure ci-contre).

    Partager via Gmail

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :