• Les ados, les parents et internet.

     

    Les ados, les parents et internet.

            Plusieurs de mes articles ont déjà été consacrés à la différence de vie entre le ados d'aujourd'hui et ceux d'hier, il y a 60 ans au lendemain de la guerre, et à leurs problèmes avec leurs parents.
              Les grands-parents on souvent une certaine 'incompréhension vis à vis du rapport de leurs petits-enfants  aux multimédias modernes et ils en concluent que les ados d'aujourd'hui sont très différents de ceux d'hier alors que les parents, utilisateurs aussi d'internet, sont moins catégoriques, mais n'arrivent pas à contrôler les agissements de leurs enfants sur le web et sont souvent très critiques sur son influence néfaste.
              Je pense que c'est plus compliqué que cela.

              A mon avis, les préoccupations, les inquiétudes des ados d'hier et d'aujourd'hui,  sont assez semblables. Certes, les études suscitent moins d'intérêt, il y a le chômage qui retarde l'entrée dans la vie active, , et le ou la petit(e) ami(e) qui fait découvrir plus tôt l'amour ou les amourettes, mais ce sont des différences qui ne changent pas la nature des problèmes.
              On retrouve les conflits et les préoccupations classiques de l'adolescence et les trois questions existencielles :
                        - Qu'est ce que je suis ?
                        - Qu'est ce que je veux ?
                        - Qu'est ce que je vaux ?
              Le conflit entre le besoin de liberté et de prendre son indépendance et celui de la sécurité au sein du nid familial.
              Le besoin de tendresse que l'ado cherche à trouver hors de la famille, car il est persuadé que les parents ne l'aiment pas assez  et qu'ils ne lui accordent pas toute l'attention qu'il attend ou sur les points qu'il souhaite.
              Le problème de trouver la juste distance vis à vis de la famille et plus généralement vis à vis des autres, se pose plus que jamais : ni trop loin car on se sent abandonné, ni trop près car on craint alors de perdre son autonomie.    

              Par contre la vie actuelle et notamment les nouveaux moyens de communication multimédia font aujourd'hui résoudre ces problèmes de façon tout à fait différente. C'est ce qui m'est apparu au contact de mes petis enfants et de leurs camarades ou des correspondants de mes blogs.
              Il est certain que les nouvelles technologies de la rencontre et de la communication viennent en aide aux ados pour les aider à résoudre ce problème de distance.
              Il est étonnant au début pour un "ancien" de voir des blogs où l'on raconte sa vie à des amis (s'il y a un mot de passe) voire à tous ceux qui viennent lire. Mais c'est d'une part une façon de décompresser de son stress et d'autre part le souhaiot de connaître l'opinion des autres, de profiter de l'expérience de ceux qui ont déjà vécu un problème analogue.
              En fait les moyens et les occasions de discuter sont bien plus nombreuses qu'autrefois où il fallait se déplacer pour voir les copains.
              Par ailleurs la virtualité de l'interlocuteur diminue la crainte d'être jugé (e) et facilite les confidences.

              Je discute parfois avec des parents ou des grands-parents qui voient dans cette plongée dans le monde virtuel un risque de "désocialisation"
              Je pense que c'est une crainte erronée, même si bien sûr on peut rencontrer des anomalies, (l'addiction aux jeux par exemple),  Même la boulimie des jeux est souvent associée à des contacts avec des amis et elle et surtout nuisible au travail scolaire, beaucoup plus qu'à la socialisation.
              Si chez les adultes, dont une partie importante du temps est pris par leur métier, les rencontres virtuelles se font au détriment des rencontres réelles, chez les adolescents, il y a alternance et complémentarité entre les deux et il est courant que se lient ainsi des amitié, virtuelles d'abord mais où les correspondants finissent par se rencontrer.

              Un problème important actuel est donc le lien entre générations, entre enfants, parents et grands-parents, qui semble beaucoup plus relâché qu'autrefois, mais c'est trop facile de dire que c'est la faute des moyens de communication modernes..
              J'ai été très sensible à ce phénomène il y a seize ans, quand j'ai créé mon premier blog. J'avais un avantage sur beaucoup de grands parents, je m'étais déjà servi de gros ordinateurs depuis 1965, de microordinateurss depuis 1980 et j'avais découvert la messagerie intranet dans l'entreprise en 1988 et internet en 1993.
              Mais lorsque j'ai été spour la première fois sur des blogs de jeunes qui véhiculaient beaucoup de préoccupations et de pensées tristes, même parfois désespérées, j'ai eu l'impression de débarquer en pays inconnu et de me sentir exclu !
              Au hasard des commentaires puis de mails, je me suis aperçu qu'en virtuel, l'âge intervenait moins et qu'à condition de se garder de juger, la barrière de l'autorité parentale responsable n'intervenait plus comme au sein d'une famille, et que le vieux singe, qui avait craint en créant son blog de passer pour un vieux c.. , pouvait finalement trouver sa place parmi les jeunes et même se rendre utile.

              Alors d'où vient le fossé parents-enfants à propos du net?
              Ce fossé existe sans le Net, et résulte du conflit qui existe entre le souhait de liberté et le besoin de sécurité des ados au sein de la famille, que j'évoquais plus haut,, ainsi que du fait que les sont investis de l'autorité et que les études plus longues et le chômage prolongent l'attente de l'autonomie complète du jeune.
              Le fossé a été accru par le fait que les deux parents travaillent le plus souvent maintenant et que les conditions de travail leur laisse peu de temps pour s'occuper de leurs enfants qui se considèrent un peu comme abandonnés. L'éloignement géographique des grands-parents y contribue également.
              Il vient aussi du fait que les jeunes passent beaucoup de temps sur le web ou d'autres moyens multimédias,, et que par ailleurs, ayant beaucoup plus de possibilités d'activités extra-scolaires qu'autrefois, ils ne s'intéressent plus autant à leurs études et ont moins de temps à conscrer aux parents et partagent de moins en moins leurs activités sportives ou culturelles, comme on le faisait autrefois.

              La méfiance des parents pour internet (et parfois leur ignorance sur ce moyen de communication), aggrave l'incompréhension.
              Bien sûr les parents craignent la rencontre d'un pervers ou d'un pédophile. Certes le risque existe mais il est moins fréquent qu'on ne le croit : aucun(e) de mes jeunes correspondant(e)s de en 15 ans, ne m'a signalé de cas et les jeunes me paraissent conscients du danger et font attention.
              Le risque qui me paraît plus important est la "contagion d'idées tristes", voire morbides, au contact de personnes malheureuses ou dépressives, voire de manipulateurs vicieux qui prennent plaisir à susciter stress et inquiétude ou à véhiculer des idées fantastiques, glorifiant les catastrophes, le sang et la mort.
              Il y a en effet un certain risque, si l'on est en permanence dans le virtuel, de se déconnecter du réel, de se faire une vie "rêvée" dans un monde imaginaire où l'on se trouve heureux, qui devient alors une "prison de verre dont on a perdu la clé". Il ne faudrait aller sur le net que bien portant psychiquement, ce qui n'est pas le cas de tous les adolescents.
               Ces risques sont réels mais peu fréquents et les parents qui diabolisent internet en raison de ses dangers, ne font que se couper davantage de leurs enfants.

              Les parents ont tendance à regarder les pratiques culturelles de leurs adolescents avec une condescendance amusée , inquiète, parfois excédée : « Ça finira bien par lui passer. »
              Pourtant il ne faut pas croire que l'adolescent féru des nouvelles technologies s'adonne à un passe-temps provisoire avant d'entrer dans la « vraie vie ». Il est déjà de plain-pied dans ce que beaucoup de parents perçoivent avec inquiétude comme le monde de demain, un monde dont ils se sentent exclus.  Alors beaucoup d'entre eux sont tentés de penser que ce qu'il y fait est inutile, voire malsain ou dangereux.
              C'est pourquoi, si nous voulons lutter contre le risque de fracture générationnelle, il nous faut partir du point de vue exactement opposé. Ce que les adolescents font sur Internet vaut la peine d'être connu parce que c'est intéressant et que nous gagnerons à nous en rapprocher. Et pour cultiver cette attitude, le mieux est de toujours nous rappeler que les espaces virtuels ne modifient pas fondamentalement l'adolescence: ce sont les mêmes angoisses, les mêmes déceptions et les mêmes espérances que par le passé, et aussi les mêmes attentes vis-à-vis des parents.
              Car ces nouveaux territoires sont aussi pour eux des espaces de construction de leur personnalité pour lesquels ils ont envie d'une reconnaissance des adultes, même s'ils ne l'explicitent que rarement. Sur Internet, c'est seulement « habillé » autrement.
              En revanche, ces espaces donnent aux émotions et aux représentations des ados un écho qui est méconnu.. Sur Internet, tout message est certain de trouver un interlocuteur qui le confirme. Cela donne aux messages joyeux une ampleur jubilatoire, et aux malheureux une profondeur dramatique. Si u niveau individuel le danger et limité, il est certain que, au plan collectif, les réseaux sociaux peuvent permettre d'organiser des actions néfastes et dangereuses, mais tout autant par les adultes que par les ados;


         

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