• Le cyber-harcèlement a des raisons voisines de celles du harcèlement scolaire

           

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        J'ai souvent entendu des collégiens, mais aussi par des lycéens et parfois par des adultes, des femmes notamment, se plaindre d'être harcelé(e)s sur internet, soit sur les réseaux sociaux, soit par SMS ou mail. 
        Ce mode de harcèlement est différent du harcèlement scolaire, et les vacances n'y mettent pas un  terme malheureusement.

        Contrairement à ce que l’on croit souvent, ce n’est pas internet qui a créé le harcèlement
        Avant l'ère d'internet, de nombreuses recherches ont été effectuées sur le harcèlement classique chez les jeunes dans le cadre scolaire.
        Le harcèlement peut être physique ou psychologique, il implique une intention de nuire de la part de l'agresseur et souvent en se servant de différences physiques, sociales, intellec-tuelles pour imposer son pouvoir.
        Ses formes peuvent être physiques (pousser, frapper, extorquer des objets ou de
    l'argent) ou verbales. L’exclusion sociale d’un groupe est également un cas fréquent du harcèlement, de même que l'atteinte à lo réputation.
        Les travaux de recherche décrivant les auteurs et victimes de harcèlement scolaire indiquaient qu'auteurs et victimes étaient plus fréquemment des garçons, que les auteurs étaient généralement plus forts physiquement, dominants, impulsifs, et avaient souvent des difficultés scolaires. Les victimes semblaient anxieuses, socialement en retrait, isolées, et physiquement plus vulnérables.

        Mais effectivement la venue des moyens informatiques et multimédias a changé la donne, non pas dans l’esprit des harceleurs et harcelés, mais dans la facilité de communication, avec internet et le téléphone portable, et aussi par le bouleversement des habitudes de vie, surtout des jeunes.
        Le « vidéo-linchage », appelé curieusement « happy slapping » aux USA, existe aussi en France depuis 20 ans : c’est, par exemple, une agression collective d’une victime tout en la filmant au moyen d’un téléphone portable, puis la diffusion du film humiliant de cette agression qui, comme un virus, peut atteindre un maximum de personnes en un minimum de temps. Dans certains cas extrêmes, l’agression physique peut être très violente et certaines d’entre elles ont même entraîné la mort de la victime.
        Depuis la loi du 5 mars 2007, la diffusion de ces images constitue une infraction pénale passible d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75 000 euros.

        Heureusement ce n’est pas la pratique la plus courante, mais des études américaines montrent combien les phénomènes d’harcèlement sont courants entre jeunes.
        Michele Ybarra, de l’université de Baltimore, a interrogé 1 500 adolescents âgés de 10 à 15 ans utilisateurs d'Internet, et a observé que durant l'année précédente, 35 % avaient été victimes de harcèlement ou de sollicitations sexuelles, tandis que 21 % en avaient été auteurs.
        Dans une autre enquête auprès de 3 767 adolescents américains utilisant ou non Internet, Robin Kowalski, de l'Université de Caroline du Sud, a observé que, durant les deux mois qui avaient précédé l'enquête, 11 % des jeunes avaient été victimes de cyberharcèlement, 7% en avaient été auteurs et victimes, et 4 % en avaient été auteurs.

        Mais il ne faut pas croire que le cyberharcèlement ait remplacé le harcèlement « classique » en classe. Une étude de Kirk William et Nancy Guerra de l’université de Californie, montrent que le harcèlement le plus fréquent est de loin le harcèlement verbal, à égalité avec le harcèlement physique vers 13 ans alors que le harcèlement sur internet est faible, puis celui-ci augment mais reste très inférieur aux deux autres, lesquels sont alors maximaux vers 15 ans, puis vers 18 ans les trois tendances diminuent un peu.
        Il est difficile de trouver des études françaises sur ce sujet avec des statistiques simples et compréhensibles qui ne mélangent pas tout.
        Par contre on trouve de nombreux articles sur le harcèlement à l’école et le cyber-harcèlement.
        
        Laurent Bègue, professeur de psychologie à l’université de Grenoble, a essayé de cerner la psychologie du harceleur : qu’est ce qui pousse un individu à pourchasser un autre, à tenter de le rabaisser, de l'humilier ou de lui faire peur, voire de le frapper.
        Il y a certainement d’abord un problème d’éducation et de fréquentation : certains jeunes croient qu'il est valorisant de harceler autrui, que c'est quelque chose de toléré. Cela résulte probablement d'une absence de discours clair condamnant ces pratiques dans l'entourage familial ou professoral, ou de la fréquentation d'individus pour qui cela ne pose pas de problèmes.
        Les élèves qui se sentent mal à l’école et qui ont de mauvais résultats en classe, sont peu surveillés par leurs parents, ne suscitent pas l’intérêt des professeurs et sont peu attachés aux institutions et usages de la société. On constate qu’ils sont plus enclins à devenir harceleurs.
        Un autre facteur est le manque de réaction de l’environnement qui « laisse faire ». et le harceleur peut avoir l'impression que sa victime est isolée, donc sans défense.
        L’usage de l’alcool et du cannabis qui diminue les facultés intellectuelles est souvent un facteur aggravant.
        Le harcèlement est souvent un phénomène de groupe, qui crée un « souffre-douleur », et on peut se demander en quoi un groupe d'élèves se sent suffisamment menacé par un seul enfant pour qu'on lui assigne la place du bouc émissaire.
        Le bouc émissaire occupe la place de celui qu'on exclut, de celui dont personne ne veut, de celui auquel on ne s'identifie pas; on harcèle pour avoir bonne conscience, pour s'assurer qu'on est du bon côté, avec la majorité ; être en groupe contre l'autre permet de renforcer la cohésion, en s’unissant contre un « ennemi » commun auquel on attribue tous les défauts que l'on n'assume pas, mais qui sont le plus souvent ceux du groupe lui même.
        Le bouc émissaire a donc une double fonction : il réveille les blessures narcissiques du harceleur ou du groupe, et en est l'antidote.   

        Le harcèlement classique et le cyberharcèlement ont de nombreux points communs, mais le cyberharcèlement se distingue par plusieurs aspects.
        D'abord, par l'implication des filles. Alors que le harcèlement physique est I'apanage des garçons, notamment dans la cour de l’école où les filles sont peu enclines à la violence physique, elles se rattrapent par l’écrit sur Internet, si bien que Ia parité de sexe est atteinte chez les harceleurs.
        Par ailleurs, contrairement au harcèlement classique, qui peut être évité par certains dispositifs de surveillance, le cyberharcèlement ne se limite pas aux murs du collège ou du lycée, et est permanent car, à n’importe quel instant du jour et de la nuit, le harceleur peut faire circuler un courriel ou un SMS malintentionné, ou encore déposer un message dégradant sur la page personnelle de sa victime.
        Surtout le harceleur est à distance de sa victime, son identité éventuellement dissimulée sous un pseudo, et il ne voit pas les réactions de souffrance de sa victime, ce qui l’empêche de culpabiliser ou d’avoir pitié, voire même de se rendre compte des conséquences de son action.
        En outre, contrairement aux harceleurs classiques, les cyberharceleurs n’ont pas besoin d’être plus forts physiquement ou intellectuellement que leurs victimes, et par contre ils peuvent diffuser des rumeurs ou des photos dégradantes pour la victime à des centaines, voire des milliers, de personnes.
        L’anonymat qui peut être une bonne chose pour protéger ce qu’on écrit sur soi-même sur un blog, peut être catastrophique en matière de harcèlement : 67% des victimes ne connais-sent pas leur agresseur d’après une étude qui montre par ailleurs, par comparaison entre des agressions avec ou sans anonymat, que la violence est deux fois plus grande quand l’anonymat donne l’impression d’impunité.
        Enfin, plus la fréquentation en temps d’internet est grande,  plus le risque d’être victime, voire agresseur est grand.

        Cela dit j’ai parlé surtout des jeunes, mais l’agressivité est une modalité du comportement des êtres vivants et particulièrement de l'être humain, chez qui elle se traduit par la violence principalement vis à vis de ses semblables. Elle touche tout autant les adultes, mais sous des formes plus diverses.

        Certains psychologues se sont demandé si l’éducation actuelle n’était pas en partie responsable de l’augmentation du harcèlement.
        Diverses causes sont avancées : Manque ou diminution de l’activité physique des jeunes, qui détend et fait évacuer stress et agressivité, suppression de tout enseignement moral à l’école primaire (qui pourrait pourtant être fait en respectant la laïcité), manque de sommeil, fatigue des parents dans le cadre de la vie actuelle, nourriture trop sucrée qui favorise l’agressivité, mais aussi résidus de produits chimiques et insuffisance d’hydratation, et surtout le manque d’éducation des parents trop laxistes, les traumatismes laissés par les divorces et les familles recomposées, et une société plus violente encensée par les médias : journaux télévisés, films, téléfilms, bandes dessinées…

         La violence en général et les nouvelles formes de violence méritent toute l'attention des scientifiques et des pouvoirs publics, mais aussi des enseignants et des parents, car elles peuvent menacer le développement social et émotionnel des adolescents, pour lesquels Internet et le téléphone portable occupent une place centrale dans la vie quotidienne.
        Mais un éducation des jeunes devrait être également faite pour qu’ils ne restent pas indifférents aux souffrances d’une victime, et n’hésitent pas à agir
        

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