• Le "courant" de nos neurones.

          En 1771 le médecin italien Galvani découvrit que les contractions des muscles de grenouille étaient engendrées par un courant électrique et cela inspira Volta qui en 1800 réalisa la première pile.
        Depuis 1952, on sait grâce aux expériences de Alan Hodgkin et Andrew Huxley, que le courant électrique qui se déplace le long des neurones comme dans des fils conducteurs  constitue le fondement de nos réflexions, de nos pensées et de nos émotions, comme il nous permet de connaître tout ce qui nous entoure, paysages comme êtres vivants.
        Pourtant, en mesurant dès 1850 la vitesse de cet "influx nerveux" et la trouvant égale à quelques mètres par seconde, le physicien et physiologiste allemand H. von Helmholtz démontrait que la propagation de l'influx nerveux dans les nerfs ne pouvait être assimilée à un simple courant électrique parcourant un fil conducteur.

        Dans mes articles sur le système nerveux et le cerveau, j’ai jusqu'à présent assimilé l’influx nerveux à un courant électrique, car c’était très suffisant pour ce que je voulais vous décrire, mais j'ai pensé qu'il fallait essayer de vous expliquer ce qu’est l’influx nerveux, mais ce n’est pas si facile que cela de le faire en termes simples

        Quand vous vous piquez la main avec une aiguille, vous ressentez une douleur avec un léger retard correspondant au temps nécessaire à la propagation d'un signal électrique de la main au cerveau. 
        Ce temps est perceptible, alors que lorsque vous branchez une lampe sur une prise de courant, l’allumage est instantané
        Dans un fil électrique métallique et conducteur, les charges électriques (des électrons) se déplacent aisément dans le sens longitudinal (le long du fil).
        Au contraire, dans un axone de neurone, la membrane est isolante, et les charges se déplacent perpendiculairement à la membrane du neurone et de l’axone; c'est ce courant transversal qui engendre une différence de potentiel nommée “potentiel d'action”, transmise de proche en proche, grâce à des phénomènes physico-chimiques, très lents par rapport au déplacement des électrons dans un fil concucteur.

        Comment ces potentiels d'action sont-ils créés dans le neurone ? 
        C’est un processus assez extraordinaire.

        De part et d'autre de la membrane d'un neurone que ce soit le corps du neurone, mais aussi tout le long de l’axone règnent des concentrations d'ions sodium Na+ et d'ions potassium K+, la concentration de ces ions dans l’organisme étant régulée de façon précise. Ces ions provenant en général de chlorures ( notamment le sel ClNa), il y a aussi des ions négatifs Cl- . Par ailleurs d’autres ions (par exemple le magnésium) interviennent aussi, mais à moindre titre et nous les négligerons.
        Sur la membrane du neurone tout au long de l’axone ou des dendrites les membranes comportent de nombreuses protéines qui sont ce que l’on appelle des “canaux ioniques” ou des “pompes à ions” (voir le schéma ci dessous)..

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau1/axonenormal.jpg

        La pompe à ion utilise une molécule qui, dans tous les organismes vivants, fournit lors de son hydrolyse, l'énergie nécessaire aux réactions chimiques des cellules : l’adénosine triphosphate (ATP).  
        Cette protéine-pompe à ions se sert de cette énergie pour sortir de l’intérieur du neurone les ions sodium et faire entrer des ions potassium, ceci en permanence et en faible quantité. Il en résulte une différence de concentration les ions K+ étant plus nombreux à l’intérieur et les ions Na+ beaucoup plus nombreux à l’extérieur de la membrane cellulaire.La pompe à ions fait entrer plus d'ions K+ qu'elle ne fait sortir d'ions NA+, cartes ions K+ sont plus petits et passent donc plus facilement par la protéine pompe à ions.
        Cette différence de concentration entre l’extérieur et l’intérieur du neurone ou de l’axone, entraîne donc une inégalité des charges électriques de part et d’autre et une différence de potentiel négative , appelé “potentiel de repos”, qui est de l’ordre de de l'ordre de -70 mV environ, entre la face intracellulaire de la membrane du neurone et sa face extracellulaire.
        Compte tenu du fait que cette membrane est très fine (quelques nanomètres) le champ électrique engendré par cette différence de charges est très fort et les ions sodium s’ils le pouvaient entreraient rapidement dans la cellule.
        Les canaux ioniques sont des protéines qui laissent passer une certaine sorte d’ion dans un sens. Ce sont en général des molécules en forme de ressort spiralé qui changent de structure dans certaines conditions (en général des phosphatations), et le ressort s’écarte, laissant passer les ions, le champ électrique favorisant le passage de la concentration la plus forte vers la plus faible. Il existe des canaux ioniques spécifiques des ions Na+, K+, Ca++, Mg+ Cl-....qui ne laissent passer que des ions du type approprié.

        Une aiguille qui “appuie” sur la membrane du neurone excite un canal moléculaire moléculaires qui laisse pénétrer sélectivement les ions sodium. Cette entrée  va agir sur les canaux voisins qui s’ouvrent également et il y aura donc une entrée massive d'ions Na+ chargés positivement  (voir schéma ci dessous).

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau1/axoneexcite.jpg

        Du fait de cette entrée de charges positives, le potentiel monte brusquement de 100 mv environ, passant localement de -70 à + 30 mv (phase 1).
        Ces ions sodium provoquent une répulsion électrostatique des ions K+ chargés aussi positivement et qui sont en bas du canal ionique potassium, provoquant son ouverture, comme en agissant sur deux leviers. 
        L'excès de charges positives provoqué par l'entrée d'ions sodium est compensé par une fuite de charges positives due à la sortie d'ions potassium, ce  qui rééquilibre les charges positives de part et d'autre de la membrane du neurone et la tension retrouve son niveau initial, (phase 2), voire même un niveau un peu inférieur (phase 3)puis remonte à la normale sous l’effet de la pompe à ions.(phase 4)
        Il en résulte localement une impulsion de tension représentée sur la figure ci-dessous : c’est ce que l’on appelle une “dépolarisation”.

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau1/potactionneurone.jpg

        Le signal se propage parce que les canaux s'ouvrent de proche en proche du fait des augmentations de concentration et donc de charges positives. Cette dépolarisation se produit donc successivement tout le long de la dendrite ou de l’axone, avec un petit retard et tout se passe comme si cette impulsion se propageait le long de l’axone, mais à vitesse beaucoup plus réduite que s’il s’agissait d’électrons, comme dans le cas de la conduction électrique. 

        Certains produits chimiques peuvent perturber le fonctionnement de ces canaux ioniques. Le venin de tarentule, par exemple, bloque l'ouverture des canaux potasium, provoque une paralysie générale des sensations et des mouvements, qui s'étendrait, au cerveau s’il n'était entouré d'un filtre efficace retenant de telles toxines, et donc empêcherait nos pensées elles-mêmes. 
        La présence des canaux ioniques, moteurs du mouvement de l’influx nerveux, est déterminée génétiquement. Hommes, rats, vers de terre, tous possèdent les séquences d'ADN qui garantissent leur présence. Si l'une d'elles ne fonctionnait pas correctement, l'effet serait désastreux.

        J’espère que ce “cours de SVT” vous a permis de comprendre comment se propageait l’influx nerveux et que cela n’a pas trop fatigué votre cerveau !!

       
     

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