• La boule de feu de la foudre, qu'est ce ?

        Je ne sais pas si vous avez vu une fois une boule de feu produite par la foudre ?
        Personnellement j’en ai vu deux fois étant jeune.

         La première fois, j’étais devant les carreaux de la fenêtre de ma chambre et je regardais notre jardin sous un orage et notamment le grand sapin d’une dizaine de mètres de haut, à une vingtaine de mètres de la fenêtre. J’avais dix ans, en 1942.
         Un coup de tonnerre effrayant presque en même temps qu’une boule de feu très lumineuse au sommet de l’arbre, puis elle est descendue le long du tronc en faisant de la fumée et a disparu dans la terre en quelques dixièmes de seconde.
         Le lendemain, on a constaté que l’arbre était étêté : la cîme de trois mètres était par terre, en partie carbonisée. Et tout le long du tronc une entaille carbonisée, et au pied, une petite cuvette dans la terre avec des cailloux qui avaient fondu et formaient une sorte de céramique. 

         La seconde fois c’était plus impressionnant ; j’étais dans la salle de séjour avec mes parents, ma soeur et mes frères, mes grands parents et une camarade de classe. Nous faisions nos devoirs sur la table; mes parents et grands parents étaient assis dans des fauteuils et mes frères jouaient à coté d’eux. J’avais à peine 15 ans.
        L’orage grondait au dehors, les coups de tonnerre étaient de plus en plus proches des éclairs et donc il se rapprochait.
   
        Soudain près de la fenêtre on voit tomber du haut métallique une boule de feu d’une vingtaine de centimètres, qui semblait tourner sur elle même, rouge et très lumineuse, tandis qu’on entendait comme un essaim d’abeille bourdonner. Elle a traversé le buffet en bois et a disparu dans la cheminée en grésillant, tandis qu’un coup de tonnerre assourdissant nous rendait sourds. Nos chevaux s’étaient dressés sur notre tête, pas de peur, mais chargés électrostatiquement, comme si on les avait frottés avec une peau de chat.

        Sur le moment on n’a pas peur, on n’a pas le temps : cela dure moins de 5  secondes.
        Heureusement personne n’était sur le trajet de la boule, il aurait été électrocuté, carbonisé. On est restés pétrifiés une minute, le cœur battant la chamade, puis on a constaté deux trous de 15 cm de diamètre dans le buffet, tout carbonisés autour et, dans une pile d’assiette, une sur deux était brisée en plusieurs morceaux. La poutre en bois de la cheminée avait aussi des traces de brûlure.
        
         J’étais alors en terminale et je suis allé voir mon prof de physique le lendemain, pour avoir des explications. Il ne m’a pas dit grand chose.car, à l’époque le phénomène était mal connu.
         A l’époque, on pensait qu’il s’agissait d’un plasma ionisé, c’est a dire un gaz très chaud, à quelques centaines de milliers de degrés, c’est à dire d’atomes et de molécules ayant perdu la plupart de leurs électrons.
        Quand la foudre tombe sur un paratonnerre, un courant de 30 000 d’ampères traverse le fil conducteur vers la terre et transporte 500 mégajoules. Il semblait plausible qu’un tel courant quand il n'y a pas de paratonnerre pour l'évacuer, chauffe l’air et qu’il y ait un énorme champ électromagnétique, qui confinerait cet air en boule de feu.

        Puis les électrons regagnent leurs atomes et la boule disparait, aspirée par l‘appel d’air de la cheminée. Quant aux assiettes c’est un effet électrostatique, la pile d’assiette se comportant comme une série de condensateurs et celle au milieu de deux autres, figurant l’isolant, cassant sous l’effet de la tension trop élevée, comme claque un condensateur en surtension.

        J’avoue que mon prof ne m’avait pas convaincu. Certes la boule était chaude, vu les trous carbonisés dans le bois, mais la fenêtre était intacte, juste fendue, mais le verre n’était pas fondu. Bizarre et mon prof n’en savait pas plus.

        A ma sortie de l’X j’ai lu en 1954/55 la théorie d’un physicien russe Piotr Kapitsa.
        Il prétendait que lorsque la foudre tombait, elle engendrait un large spectre de rayonnements, visibles, mais aussi ultraviolets, infra-rouges et aussi des microondes.
        Ces microondes pouvaient traverser le verre sans le fondre, et chauffer l’air de façon à le mettre en boule très chaude et former un plasma de très courte durée, à un endroit ou se croisaient les microondes directes et celles réfléchies par le sol.
        Mais un plasma se détruit en quelques millisecondes et la boule de feu dure bien plus longtemps.
        On n’était donc guère plus avancés que Tintin, dans les « Sept boules de cristal » (j’espère que vous l’avez lu au moins !!).

        En 2006 j’ai lu une étude du physicien israélien Eli Jerby, sur une » perceuse à micro-ondes » qu’il avait inventé. Dans un four, une électrode métallique focalise les micro-ondes et, lorsqu’elle est mise en contact avec un matériau de type céramique ou os,
    elle crée un «point chaud » qui crée un trou par la vaporisation du matériau.
        Si l'électrode est retirée du matériau à percer, une boule flottante, d'une dizaine de centimètres de diamètre, rougeoyante, très similaire à la foudre en boule, est créée. Celle-ci dure tant que la puissance micro-onde est fournie et Eli Jerby pensait que ce n’était pas seulement l’air qui était chauffé, mais les poussières de silicium arrachées à la céramique et ce sont ces poussières qui permettaient une aussi longue durée du phénomène. 


        
        Je viens de lire une étude de 2014 au cours de laquelle des physiciens chinois ont pu, par hasard, analyser l’émission lumineuse d’une boule de feu de foudre (tombée sur le labo au cours d’une expérience de spectrographie), et déduire des raies spectrale, la présence de certains éléments (voir figure ci-dessous) : fer, silicium, calcium, azote et oxygène (de l’air).
        La boule de feu était extraordinaire : elle faisait 5 mètres de diamètre, et s’est déplacée sur 15 mètres de long en 1, 64 secondes.
        Cela confirmerait la thèse d’Eli Jerby  et des essais ont été faits au synchrotron de Grenoble pour analyser la boule de feu de sa perceuse.


        La théorie serait que la foudre vaporise du sable (dioxyde de silicium) et du carbone de la végétation et à haute température le carbone réduit le dioxyde de silicium en silicium pur, réaction dont la chaleur  dégagée entretient la réaction tant qu’il y a des poussières sous forme de nanoparticules dans l’air.
        Des chercheurs brésiliens se sont amusés à attaquer des plaquettes de silicium avec des pointes de soudage électriques à haute température, et ils ont fait des « bulles de feu » de quelques centimètres de diamètre, mais les boules roulaient sur le sol sans flotter dans l’air.
        Donc il ne s’agit plus d’un simple plasma ionisé d’atomes d’azote et d’oxygène, comme le croyait mon prof de physique,  mais de poussières de silicium et éventuellement d’autres métaux vaporisées par la décharge électrique de la foudre, et de réactions d’oxydo-réduction, provoquées au départ par les microondes rayonnées par la foudre et entretenues par la chaleur qu’elles dégagent par réaction chimique exothermique.

        Je mourrai moins bête : une énigme de mon adolescence résolue. Enfin pas totalement. Ils n’ont pas expliqué pourquoi une boule sphérique et pas un cylindre ou un cône. Je reste sur ma faim !!! lol

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