• Gaz et pétrole de schiste aux USA. (1)

              Je suis toujours étonné par le nombre d'inexactitudes qui sont dites à la télévision, et la légèreté avec laquelle certains écologistes manient le principe de précaution, certes en exploitant des erreurs et des dangers réels, mais aussi en négligeant de regarder si des parades sont possibles, et les aspects positifs qui existent aussi.
              Malheureusement les politiques se laissent prendre au piège, ne voulant pas contredire les médias, ni perdre des électeurs, et ainsi des décisions contestables sont prises.
              La télévision évoquait il y a quelques semaines, le problème des gaz et pétroles de schistes, qui est un parfait exemple de ces déviances.

                L'exploitation des produits de schiste a été à la fois très bénéfique et néfaste aux Etats Unis où elle s'est faite dans des conditions particulières.
              il faut savoir en effet qu'au USA, le sous-sol appartient à celui qui possède le terrain et n'importe qui peut exploiter du pétrole ou du gaz sur le sol lui appartenant, et cela dans des conditions qui peuvent être déplorables.
              En principe, les producteurs de gaz sont tenus à gérer les conséquences de leurs rejets : ils doivent déclarer ces déversements, concevoir leurs propres plans d'intervention et assurer le nettoyage. Lorsque ce sont de grosses entreprises pétrolières la sécurité est assurée, mais lorsque ce sont de petites entreprises, voire des particuliers, le risque est malheureusement réel

             Voyons d'abord quelle est la technique d'exploitation des gaz et pétroles de schiste.
             
    Il faut creuser d'abord un forage vertical jusqu'à environ 2500 m de profondeur, puis un forage horizontal, ce qui est une opération courante et classique pour une entreprise spécialisée du pétrole.
    Ci dessous un trépan classique (puits verticaux) et un trépan de turboforage (puits horizontaux).
    Gaz et pétrole de schiste aux USA.Gaz et pétrole de schiste aux USA.

             

     

     

     

     

     

     

             

     

                Mais il faut ensuite libérer l'huile ou le gaz emprisonné dans la roche schisteuse.


              A 2500 m de profondeur, c’est un petit tremblement de terre : pour réunir les micro-poches en une unique poche de gaz, un explosif est détonné pour créer des brèches. Elles sont ensuite fracturées à l’aide d’un mélange d’eau, de sable et de produits chimiques propulsé à très haute pression (600 bars) qui fait remonter le gaz à la surface avec une partie de ce “liquide de fracturation”. Chacun de ces “fracks” nécessite de 7 à 15 000 mètres cube d’eau (soit 7 à 15 millions de litres), un puits pouvant être fracturé jusqu’à 14 fois.
                Pour chaque “frack”, deux cents allers-retours de camions sont nécessaires au transport des matériaux de chantier, de l’eau, puis du gaz. De quoi transformer n’importe quelle nationale en autoroute. Sans compter les rejets de CO2 des raffineries, le bruit généré par le site et la transformation du paysage environnant.
                Mais ce n’est là qu’un des aspects des nuisances et une partie de l’eau peut être recyclée.

                De nombreux incidents ont en effet eu lieu dus à l'inexpérience des utilisateurs et à un manque de règlementation et de contrôles.
                A la fin de 2008, des déchets de forage et de mines de charbon rejetés en pleine sécheresse, ont saturé la rivière Monongahela, au point que les autorités locales ont recommandé aux résidants de la région de Pittsburgh de boire de l'eau en bouteille. Dans un document interne, les représentants des autorités ont dépeint cet incident comme "l'un des pires cas où, dans l’histoire des USA, les autorités ont été incapables de fournir de l'eau potable à la population.   

                De plus le gaz s'est infiltré dans les nappes phréatiques dans cinq Etats au moins des USA.
                La pollution de l'air due à ces exploitations constitue elle aussi une menace grandissante. Ainsi, en 2009, le Wyoming n'a pu satisfaire aux critères de qualité de l'air pour la première fois de son histoire, entre autres à cause des émissions de benzène et de toluène de quelque 27 000 puits, pour la plupart ouverts au cours des cinq dernières années.

                Si l’on en croit l'Environmental Protection Agency (EPA, agence fédérale de protection de l'environnement), lors d'opérations de fracturation, des sels de radium  (minerais dans le sol) ont été remontés par les eaux utilisées.
                 La radioactivité mesurée dans les eaux usées est dans certains cas plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de fois supérieure à la limite fédérale autorisée pour l'eau potable, ce qui à priori n’est pas grave puisque personne ne boit ces eaux usées, mais  il n'existe aucune réglementation fédérale relative aux niveaux de radioactivité acceptables dans des eaux de forage.
                 Les compagnies de forage ont acheminé en 2008 et 2009 au moins la moitié de ces eaux usées vers des stations d'épuration publiques, mais ces usines de traitement ont une capacité bien moindre d'élimination des polluants radio-actifs que pour la plupart des autres substances toxiques et elles ne peuvent ramener les taux d'éléments radioactifs à des niveaux respectant les normes pour l'eau potable avant de rejeter les eaux usées dans des cours d'eau, parfois à quelques kilomètres seulement en amont de centres de production d'eau potable.
                 En décembre 2009, ces risques ont amené des scientifiques de l'EPA à adresser une lettre à la ville de New-York pour conseiller aux autorités municipales de ne pas accepter dans les stations d'épuration des eaux usées issues de forage présentant des taux de radium12 fois supérieurs au seuil autorisé pour l'eau de boisson.
                 Certaines eaux usées contenaient des taux de radiurn 100 fois supérieurs à ce seuil et des scientifiques de l'EPA ont mis en évidence que certaines rivières de Pennsylvanie ne parvenaient pas à diluer suffisamment les eaux usées mêlées de radium qui y étaient déversées.
              Un bilan des plans d’intervention sur les projets de forage de 4 sites de Pennsylvanie où se sont produits des accidents, a fait apparâître que ces plans, pourtant approuvés par l'Etat, étaient souvent contraires à la loi. Les sociétés "subissent des pressions", elles doivent 'faire des économies",  et "Cela revient moins cher de rejeter. les eaux usées que de les traiter. " !!!   

              De tels incidents sont évidemment inquiétants et ils ont été largement diffusés dans les médias, ce qui inquiète tous les lecteurs à juste titre. Mais on ne parle guère de la façon dont ils auraient pu être évités (ce n'est pas sensationnel !) et on ne montre pas que depuis cette période, les problèmes semblent avoir été beaucoup moins épineux.

              Mais le gaz et le pétrole de schiste ont été une énorme manne économique pour les Etats-Unis.
               
    En 2017, la production de gaz et de pétrole de schiste est multipliée par 10 par rapport à 2007, et le pétrole de schiste représente la moitié du pétrole brut produit aux États-Unis. Face à la diminution des réserves de pétrole conventionnel, le pays se tourne de plus en plus vers cette alternative non-conventionnelle, d'autant plus que la combustion du gaz de schiste produit beaucoup moins de CO2 que le charbon.

                 Les Etats Unis devraient dépasser l'Arabie Saoudite comme producteur de pétrole, ce qui lui assure une indépendance dans les relations avec ce pays.
                 De plus cette exploitation a généré la création de plus de 600 000 emplois directs aux USA.
                 Mais cette augmentation importante de production a fait baisser les prix du pétrole et une crise a eu lieu en 2014, lorsque le prix du baril est passé au dessous de 30$, remettant en question la rentabilité de l'exploitation. Celle-ci a repris, le prix actuel du baril étant un peu au dessous de 50 $.

                  Comme toute exploitation, celle du gaz de schiste a des avantages et des inconvénients. La France a choisi pour le moment de l'interdire sur notre pays. Est ce une bonne solutions?
                 J'essaierai dans les prochains articles d'examiner divers paramètres de cette question.

     

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