• Eloge des 7 péchés capitaux : la colère.

    Eloge des 7 péchés capitaux : la colère.

         Les avis sur la colère sont assez divers       

        Zeus, le dieu suprême, était souvent en colère et foudroyait facilement tous ceux qui l’irritaient ou lui résistaient.
        Les Dieux font cadeau de leur colère aux hommes antiques; les voilà non seulement voués à la colère des Dieux, mais eux-mêmes deviennent sujets à la colère.
        Pour Aristote la colère est une bonne chose, puisque se mettre en colère est une manière de s’insurger contre l’injustice et de mettre en pratique nos principes moraux. Mais Aristote comme Rousseau estimait que l’homme était bon par nature.
        Pour Saint Thomas d’Aquin, c’'est une passion causée par plusieurs autres passions : la tristesse, le désir et l'espoir. Mais elle procure à l’homme du plaisir, d'autant plus qu'il a été blessé et c’est je suppose, ce plaisir que condamne Saint Thomas. Mais il pense qu’elle poursuit un bien, celui d'affirmer la justice. Mais alors pourquoi l’affubler du nom de péché capital ?
         D’ailleurs Jésus lui même s’est mis en colère au nom de la justice au Temple de Jérusalem : il  se fabrique un fouet avec des cordes et chasse du temple de Dieu, tout le monde et notamment les marchands.
        La “sainte colère”, celle qui  peut être justifiée, est la capacité de distinguer le juste et l'injuste et de s'opposer à l'injustice en intégrant par la colère une part de divin et de principes moraux.  C’est bien prétentieux de la part des hommes !!
        Tandis que la haine veut le mal pour le mal, la colère considère comme un acte de justice, la punition qu'elle désire infliger à un injuste agresseur .
        Mon prof de philo disait : “La colère est la non-acceptation de l'inacceptable.” Beau sujet de bac n'est ce pas ?
        C’est vrai que souvent les racines de la colère sont l’injustice et l’impuissance à l’empêcher, mais ce n’est pas toujours vrai.

        Je me souviens de deux réflexions d’auteurs latins que nous traduisions autrefois, quand j’étais au lycée.
        Sénèque disait que “ L’homme est fait pour aider les autres hommes ; la colère, pour les exterminer” et Caton, plus terre à terre, affirmait : “Un homme en colère ouvre sa bouche et ferme ses yeux”.
        Ma grand-mère disait beaucoup moins poliment lorsque j’avais une quinzaine d’années : “Je te donne un conseil, mon petit, si tu es en colère, surtout ferme ta gueule, sinon tu le regretteras ensuite !”
        Un autre auteur dont j’ai oublié le nom, écrivait : “la colère nous fait perdre la raison, même si sa cause est à l’origine justifiée”.
        Et les dictons populaires ne sont pas tendres non plus : “la colère est mauvaise conseillère” ou “la colère est de la folie passagère”. !

        Par contre Marc Aurèle me paraît avoir une vue plus réaliste lorsqu’il dit  : “Les effets de la colère sont beaucoup plus graves que ses causes”.
        C’est vrai que l’homme en colère peut ne pas se contrôler, comme sous l’effet de l’alcool ou du cannabis, tenir des propos désagréables, envenimer les discussions et blesser voire tuer quelqu’un, s’il recourt à la violence.
        La colère fait partie des grandes passions de l’âme, irrationnelle à souhait.

        Mais à l’origine, la colère est faite pour nous sauver. C’est l’une des rares émotions dont le neurobiologiste connait en partie l’origine.
        Je vous ai souvent dit que les centres amygdaliens du cerveau émotionnel étaient à l’origine de la peur et de la colère.
        Devant la peur ils préparent nos réactions de défense : la fuite ou la colère face à l’agresseur.
        La colère est donc une émotion normale, naturelle.
        Finalement le problème c’est de la maîtriser pour qu’elle ne dégénère pas.

        Vous connaissez sûrement l’histoire de l’instit qui faisait marquer des croix à la craie dans le coin du tableau noir par un élève coléreux, chaque fois qu’il se laissait emporter. Le premier jour il y en avait 10, puis le nombre de croix a décru chaque jour; il n’y en avait plus de supplémentaire tous les jours au fur et à mesure qu’il apprenait à se maîtriser, et même ses accès ont totalement cessé. L’Instit a alors proposé d’effacer une croix pour chaque jour sans colère et au bout de quelques semaines, il n’y avait plus de croix blanches sur le tableau noir !

        En fait trop réfréner sa colère n’est pas bon non plus.
        Il existe des expressions positives de sa propre colère, qu'il est possible d'apprendre, de même qu'il est possible et  souhaitable de savoir accueillir plus sereinement la colère des autres.
         Les psychologues ont montré les effets nocifs de la censure de la colère, qui enferme l'individu dans des “non-dits”, qui perturbent la relation à soi-même et aux autres.

        Loin d’être à mon sens, un péché capital, la colère est une émotion normale de l’homme face à des situations stressantes inattendues et notamment des injustices.
        Le problème c’est essentiellement de ne pas se laisser emporter par elle et de savoir la maîtriser.


    Partager via Gmail

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :