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    Nez biologique et nez artificiel

    Nez biologique et nez artificiel

     

     

     

     

     

             J’ai écrit  le 23 mai 2020, un article sur l’odorat (Des souris et des hommes).
              Je voudrais reprendre cet article et ce sujet, de façon un peu plus détaillée et le compléter en se demandant comment réaliser des « nez électroniques »,          
             Je le complèterai demain en parlant de nos odeurs corporelles et de leur origine et en disant quelques mots sur le diagnostic des maladies par l’odeur du malade.

     

               D’abord quelques données générales :

                          - Sentir une odeur, c’est détecter une molécule chimique.
                          - Deux personnes qui sentent une molécule chimique, ne perçoivent pas exactement la même odeur.
                         - En effet les odeurs sont des représentations mentales suscitées par l'action de nombreuses molécules volatiles sur les récepteurs des neurones sensoriels de l'organe olfactif, les neurones du centre d’interprétation identifiant ensuite la combinaison de récepteurs qui ont détecté l’odeur, combinaison qui est caractéristique de cette odeur et en est en quelque sorte « l’image ».
                         - A chaque odeur est associée une dimension de plaisir ou de déplaisir qui est acquise par apprentissage, grâce à notre système de récompense du cerveau.
    -                     L’odorat d’une personne varie aussi au cours de sa vie et de ses divers apprentissages. Il peut aussi diminuer avec l’âge ou certaines maladies.

               Voyons maintenant ce qui se passe au niveau des cavités nasales et du cerveau. En fait l’odorat est probablement le plus complexe de nos sens.
    Nez biologique et nez artificiel           Nous pouvons détecter des millions de milliards d’odeurs, correspondant à des molécules chimiques. A cette fin, notre épithélium nasal, dans le haut de notre nez, contient des millions de récepteurs olfactifs, associés à un neurone. On ne peut donc associer une odeur à un seul récepteur spécifique.      
              C’est ce qui fait la complexité de l’odorat. C’est en effet la combinaison de signaux de plusieurs récepteurs qui caractérisera l’odeur. 
            Les axones de ces neurones de détection traversent une lame osseuse percée d’un très grand nombre de trous, et atteignent le bulbe olfactif, en fait deux bulbes ditués à droite et à gauche, à la base du lobe frontal. (voir figure ci-contre).

              Dans ces bulbes, les informations provenant des divers récepteurs du nez, sont interprétés par des groupes de neurones, petits « grains » appelés « glomérules ».
             Chaque odeur active des groupes de neurones différents et produit donc dans ces glomérules, une « image spatiale » de l’odeur.

               Puis cette information est transmise à un petit centre nerveux du lobe temporal, le « cortex piriforme ». Celui-ci est en relation avec les centres amygdaliens, qui associent l’odeur à des émotions, avec l’hippocampe qui va les mémoriser, avec le circuit d’apprentissage et de récompense, qui va en particulier attribuer aux odeurs une valeur hédonique (agréable ou désagréable), et avec le cortex orbitopréfrontal, qui va nous faire « prendre conscience de l’odeur et de nos réactions à son contact.
              Le cortex piriforme rassemble donc la carte des enurones qui va déterminer l’odeur en cause, mais rajoute des informations de lieu et de temps, examine avec l’hippocampe les perceptions antérieures, identifie donc l’odeur mais y rajoute les informations émotives venues des centres amygdaliens et du système de récompense. C’est ainsi une information très élaborée qu’il va transmettre au cortex obitopréfrontal. Il peut aussi regrouper des informations par catégories par exemple des odeurs de sortes de fleurs.

               Certaines odeurs ou leur reconnaissance sont codées de façon innée, soit sans en avoir fait l’expérience, (par exemple pour un animal, l’odeur de prédateurs), soit après une expérience automatique (l’odeur de sa mère et du lait pour le jeune bébé), la plupart seront « apprises » par apprentissage, ce processus expérimental étant inné et inconscient.
              Le mécanisme général est évidemment inné. Environ 900 gènes codent la création de protéine qui sont capables de se lier aux molécules odorantes et de permettre aux récepteurs de donner alors un signal transmis par les neurones. Mais seuls 400 gènes environ sont actifs. Il est probable que les autres correspondent soit à des duplications, soit à des capacités de détections d’odeur qui étaient nécessaires pour la survie de l’homme préhistorique. Certaines molécules chimiques peuvent avoir des récepteurs correspondant à des gènes différents et dont un seul est activé, et pas forcément le même chez tous les individus. Une odeur particulière peut alors être ressentie différemment selon les personnes. Il existe même des différences innées de perception à l’échelles de populations différentes qui n’ont pa eu la même évolution génétique.
              Mais bien entendu une très grande proportion de nos capacités olfactives est d’origine apprentissage. Cela se fait de façon partiellement inconsciente au cours de notre vie, par la mise en contact avec des odeurs nouvelles.
               Cet apprentissage peut aussi être volontaire et aboutir à des capacités très pointues et détaillées comme celle des sommeliers ou des « nez » qui élaborent des parfums. 

               Nous utilisons tous notre odorat à de fins de vie personnelle, mais aussi dans certains cas de vie professionnelle, car la détection d’odeurs peut être importante au plan de la sécurité de l’agrément ou de la reconnaissance de caractéristiques de produits.
              Il serait donc utile dans certains cas de pouvoir détecter certaines odeurs par des capteurs artificiels.
              Nous ne savons pas actuellement prédire ce que sera l’odeur d’une molécule donnée dont nous connaissons les caractéristiques chimiques.
               Cela n’est pas gênant dans le cas où l’on veut détecter une molécule mais sans référence à l’odeur que sentent les humains, par exemple détecter du gaz, ou un produit dangereux. On peut alors trouver des capteurs qui détectent cette molécule chimique.
               Nous pouvons aussi utiliser des odorats autres qu’humains, par exemple des chiens.
              En fait, si l’on veut vraiment créer des « nez artificiels », il faudrait disposer de détecteurs, ressemblant aux capteurs biologiques et c’est là le problème.
              Des chercheurs ont prélevé de l’épithélium olfactif de chien ou des systèmes olfactifs d’insectes, que l’on insère dans une membrane cellulaire artificielle..
              Mais il faut ensuite mettre au point des logiciels qui associent les signaux des divers capteurs et on est loin de savoir faire aussi bien que le cortex piriforme et les performances sont pour le moment très limitées.

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  •             Comment le cerveau détermine t’il d’où vient un son, ce qui peut parfois être important pour notre survie, mais aussi sert dans les conversations à différencier nos interlocuteurs. (voir mon article d'hier)

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                Un premier organe intervient : les pavillons de I'oreille, qui ne réfléchissent pas les sons de la même façon selon qu'ils viennent de devant, de derrière, du haut ou du bas.

                Comme évaluer d’où vient le son est primordial pour notre survie dans certains cas, ce n’est pas le centre d’interprétation auditif qui fait ce travail, car les signaux qu’il reçoit passent d’abord par le thalamus et la rapidité n’est pas suffisante.
               Mais en quelques millisecondes les centres amygdaliens sont alertés directement et c’est un centre du tronc cérébral à la base du cerveau, au dessus de la colonne vertébrale qui est directement alerté lui aussi et va interpréter les signaux qu’il reçoit en temps réel de l’oreille interne          
               D’abord, il va exploiter de minuscules différences qui résultent du fait d'écouter le même son avec les deux oreilles à la fois. Les ondes sonores issues d'une source unique n'atteignent pas les deux oreilles au même moment : même s'il ne s'agit que de fractions de milliseconde, les ondes arrivent plus tôt à l'oreille qui est plus proche de la source. Des neurones du tronc cérébral vont évaluer cette infime différence.
               Un autre effet favorable est produit par le fait que la tête agit comme un silencieux, atténuant surtout pour les hautes fréquences. Cela produit de petites différences de volume sonore (l’intensité du son) entre les deux oreilles, Un autre groupe de neurone détecte aussi ces différences de volume.        
                Enfin, le système auditif du tronc cérébral peut utiliser la différence de phase de l'onde sonore entre les deux oreilles pour localiser une source sonore. L’onde sonore, qui traduit statistiquement les vibrations des molécules de l’air, a une forme sinusoïdale avec des maxima et des minima. Si I'onde sonore atteignant l'oreille la plus proche se trouve à un maximum de son oscillation, il n'en va peut-être pas de même lorsqu'elle atteint i'autre oreille, sauf si elle a réalisé un nombre entier d'oscillations. Ce paramètre donne aussi une indication sur la provenance du son.      
                Les neurones d'un centre nerveux nommé olive bulbaire supérieure, situés dans le tronc cérébral, évaluent donc ces trois paramètres. Le cerveau détermine ainsi précisément, dans un plan horizontal moyen des oreilles, la direction d'où provient le son. Si les paramètres sont identiques pour les deux oreilles, le son est situé juste devant ou juste derrière.
                L’analyse des réflexions des pavillons permet de différencier ce dernier cas et d’avoir une idée de la direction en altitude de la venue du son, mais moins précise que la localisation angulaire horizontale.
                A noter que le tronc cérébral reçoit des signaux de nos divers sens pour une interprétation d’urgence, transmise ensuite aux centres amygdaliens pour donner l’alerte si nécessaire, puis par l’intermédiaire du thalamus au cortex frontal.

               Voyons maintenant quelles ont été les études faites par Holger Schultze sur des gerbilles de Mongolie.
               Il a d’abord étudié la réponse des neurones du centre auditif à des sons de fréquences diverses. Il a ainsi déterminé des cartes de zones sensibles aux différentes fréquences pures, dépourvues d’harmoniques (cartes "tonotopes" elles sont représentées par l’ordinateur avec des couleurs différentes.). Ces groupes de neurones s’organisent en bandes.
              Une zone qui reçoit l’influx correspondant à un son de fréquence donnée (ou très voisine, petit rond blanc du milieu) peut inhiber les deux zones voisines, sensibles à des fréquences un peu différentes, (inhibition locale, pour renforcer le signal et mieux identifier la fréquence en cause). Cette inhibition locale permet donc de distinguer la voix d'une personne ayant une fréquence fondamentale parmi d’autres personnes ayant des fréquences fondamentales différentes.
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            Si on observe les « cartes cycliques » qui représentent les évolutions périodiques de l’onde sonore en minima et maxima dans le temps, les neurones concernés sont situés radialement par rapport aux précédents, c’est à dire que pour une zone de neurones correspondant à une fréquence donnée, les neurones concernant les périodicité de l’onde sont organisées autour d’elle comme des parts de gâteau.
            Si maintenant on fait entendre plusieurs sons différents, correspondant à des harmoniques différentes d’une même fréquence fondamentale, par exemple provenant de plusieurs personnes ayant la même fréquence fondamentale, le point central est le même, (fréquence moyenne fondamentale identique), mais les neurones enregistrant les périodicité différentes propres aux harmoniques de chaque personne, sont situés sur des parts de gâteau situées différemmentautour du point central, chaque part de gâteau correspondant donc à un interlocuteur différent. 
            Si l’attention se porte sur un interlocuteur donné, les neurones du point central peuvent inhiber radialement toutes les « parts de gâteau », sauf celle correspondant à l’interlocuteur privilégié.
           Cette inhibition s’effectue par des neurones (leurs axones et les dendrites des suivants), en mettant en jeu le neuromédiateur GABA, qui induit des tensions négatives sur les synapses et donc bloque les influx nerveux.
           Cette inhibition est provoquée par le cortex préfrontal qui appelle l’attention sur une voix particulière, qu’on veut entendre, au milieu des autres. De plus il va aussi appeler l’attention des autres sens sur cette personne, et notamment de la vue, qui peut, dans l’incertitude entre deux mots, aider le centre de Wernicke à déchiffrer la parole en comparant au son, le mouvement des lèvres, voire la mimique et les gestes.

            Il est certain que cette aptitude à discriminer un son au milieu d’un bruit de fond est une opération tout à fait remarquable du cerveau. Elle suppose que les signaux transmis par l’oreille interne soient excellents et que les transmissions de signaux soient rapides et parfaits, car le centre de Wernicke va en permanence comparer les sons entendus à des mots et à leur signification, donc à des appels incessants en mémoire.
          Avec l’âge (ou une maladie), d’un part les performances de l’oreille diminuent et d’autre part les cartes tonotopes dont moins performantes et ont tendance à se chevaucher. La discrimination est moins bonne et on a des difficultés à isoler ce que vous dit un interlocuteur, du bruit de fond ambiant.

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  • http://lancien.cowblog.fr/images/Images2-1/78025920891366460x306p.jpghttp://lancien.cowblog.fr/images/Images2/photoambiance3de7e2.jpg

                Vous avez souvent constaté que lorsque vous vous trouvez dans un lieu où beaucoup de personnes parlent ensemble, (un déjeuner, une fête, avant ou après une réunion…), le niveau sonore est très élevé et couvre tous les bruits, les rendant inaudibles un par un : la pièce résonne de toutes les voix, de tous les bruits des allées et venues, éventuellement du tintement des verres..
                Et pourtant, vous arrivez à comprendre ce que vous dit votre interlocuteur, voire à entendre des personnes voisines qui parlent de vous ou d’un sujet qui vous intéresse.          Cela nous paraît normal, parce que nous y sommes habitués, mais notre cerveau réalise cependant un travail extraordinaire : filtrer l’information pertinente parmi tout ce bruit et ces bavardages. Aucun système électronique même très sophistiqué n’atteint actuellement les performances du cerveau dans ce domaine.
                C’est un travail très difficile car fait « en temps réel » : la personne ne répète pas sa phrase : il n’y a pas de rattrapage possible. Il faut que le cerveau évalue tous les paramètres du son et les compare à des valeurs anticipées. Ce travail est tellement pointu, qu’il est souvent à la limite de ses capacités, notamment en matière de rapidité mémorielle, et il n’est pas étonnant que cette capacité de reconnaissance en ambiance bruyante, diminue avec l’âge ou si vous avez une baisse des capacités auditives.
                Colin Cherry, de l’Impérial Collège de Londres a été l’un des premiers chercheurs à s’intéresser à ce phénomène dans les années 50 et j’ai lu un article sur ce sujet de Holger Schultze, professeur d’oto-rhino-laryngologie à l’université d’Erlangen Nuremberg, en Allemagne.

             On peut constater que, lorsqu'un sujet entend deux discours différents en même temps, il ne comprend que celui sur lequel il fixe son attention. Il ignore la seconde voix.

             Le cerveau s'aide d’abord de la direction d'où provient le signal sonore. Les voix des diverses personnes qui parlent viennent de directions différentes et peuvent ainsi être distinguées dans une certaine mesure.
                Mais nous sommes capables de distinguer les voix de plusieurs chanteurs même si elles viennent d’une prise de son réalisée avec un seul microphone, et également si le son n’est diffusé que par un seul haut-parleur. La situation est encore plus difficile au téléphone : nous devons non seulement nous contenter d’une seule source sonore, mais nous ne l’entendons que d'une oreille, et, malgré cela, nous pouvons distinguer différentes voix, appartenant à des personnes que nous connaissons.
               Al Bregman, de l’université McGill à Montréal pense que notre cerveau reconnaît des « objets audio », par analogie à des objets visuels, reconnus par nos yeux, en fonction de caractéristiques physiques des sons : fréquences, volume sonore, et leurs variations dans le temps.
                Notre cerveau sait faire une analyse de fréquences (mais moins bien qu’un chien qui reconnaît le pas de son maître à 100 mètres !). Ainsi la fréquence fondamentale d’une voix d’homme est vers 100 Hz, alors que celle d’un enfant est vers 400 Hz. Les voyelles, qui sont les parties les plus sonores du langage, sont composées d’harmoniques (superposition de fréquences doubles, triples …) que le cerveau reconnaît.
               Mais surtout des expériences menées sur des souris de laboratoire et sur des gerbilles ont montré que tous les bruits étaient transmis par l’oreille au cerveau, à différents groupes de neurones, mais que la concentration de celui-ci sur sa tâche de reconnaissance entrainait des blocages entre centres et que seules les informations jugées pertinentes étaient transmises aux centres utiles, et, dans le cas de l’homme et de la parole, au centre de Wernicke, qui la reconnaît et la traduit en termes significatif pour le cortex frontal.

               Demain je détaillerai la reconnaissance des sons au plan de l’orientation et je reviendrai sur ces blocages.

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  • http://lancien.cowblog.fr/images/Caricatures3/musique.png 
                 Beaucoup de personnes que je connais lisent ou travaillent avec un fond sonore. Il m'arrive souvent de travailler sur mon ordinateur en écoutant de la musique classique?
                 Peut on vraiment travailler en écoutant la radio par exemple?
                 Les chercheurs font des études sur l'influence du bruit et de la musique sur l'attention et la mémorisation.

                Les recherches sur les environnements sonores et la mémoire ont commencé par évaluer l'effet du bruit.
                Contrairement à ce que l'on pourrait attendre, le bruit ne semble pas gêner la mémorisation. Seuls les bruits intenses et chroniques entraînent des perturbations et s'ils sont très forts des destructions dans l'oreille interne.
                Pierre Salamé, psychologue au Centre d'études bioclimatiques de Strasbourg, a étudié l'effet d'environnements sonores tels que la musique instrumentale et vocale.
                Les résultats furent inattendus : si la musique instrumentale ne gêne pas ou très peu (selon les expériences), les chansons entraînent, en ce qui concerne la mémorisation, une baisse de performances d'environ 70 % par rapport au groupe témoin travaillant dans le silence.

                 Ces recherches ayant été établies sur la mémorisation à court terme, il convenait cependant de vérifier si on pouvait généraliser les résultats à des situations plus variées de mémorisation ainsi qu à des situations d'apprentissage en milieu scolaire.
                Une expérience a été réalisée dans un collège avec six classes de sixième. Les élèves devaient passer quatre épreuves dans différents environnements sonores similaires à ceux qu ils pouvaient rencontrer dans leur vie courante.
                Les élèves disposaient de dix minutes pour mémoriser un texte d'une page en histoire, français ou biologie. Ensuite, ils devaient répondre à des questions sur ce texte pour évaluer leur degré de mémorisation, ou bien compléter un texte comportant des blancs.
               Certains travaillaient dans le silence, d'autres dans des environnements d'airs de jazz ou de musique symphonique, d'autres en écoutant des chansons à la mode. Les groupes permutaient ensuite.
                Les airs sans parole ne perturbaient pas en général le travail, ou très légèrement quand, trop connus, ils incitaient les élèves à les fredonner.
                Les airs vocaux par contre perturbaient de façon importante l'apprentissage, mais les mêmes airs étaient sans action sur la copie d'un dessin, en noircissant des cases, tâche manuelle sans nécessité de réflexion importante.
                Des essais menés sur des adultes avec de la musique classique et des airs d'opéra chantés, ont donné des résultats analogues.

                 Comment expliquer cet effet?
     
               Pendant la lecture et la mémorisation, les mots sont codés dans des systèmes sensoriels (système visuel, ou auditif si la leçon est entendue), puis dans Ie système lexical qui reconnaît les mots (centre de Wernicke), puis leur attribue un sens (centre de Geschwind), et enfin dans une mémoire sémantique, via le cortex préfrontal et l'hippocampe, qui retient le sens du texte et de la leçon. Tout se passe bien ainsi dans le cas de la lecture en silence, car Ie système lexical peut traiter les mots de la lecture.

                Mais si on entend simultanément une musique comportant des mots, les mots de Ia lecture et ceux des paroles de la musique, entrent en concurrence.
                Cela peut être comparé à ce qui se passe dans un ordinateur peu puissant, qui ralentit lorsque deux tâches sont exécutées simultanément (en fait alternativement par petits morceaux traités les uns après les autres).
                Des chercheurs américains ont montré que, si la langue de la chanson est connue, la gêne est encore plus forte, car l'individu comprend les paroles, ce qui entraîne une concurrence dans le système sémantique, c'est-à-dire l'analyse du sens.
                À l'inverse, lorsque deux tâches sollicitent des systèmes différents, par exemple mémoriser tout en sifflant, (siffler en travaillant comme les nains de Blanche Neige), cela n'entraîne pas de déficit, car les centres du cerveau n'ont pas à faire face à des doubles tâches.
               Ainsi, dans l'expérience où il s'agissait d'écouter des chansons en réalisant une activité manuelle, il n'y avait aucune de gêne, car c'est la mémoire procédurale qui était sollicitée pour le dessin.
                Du fait que le système d'analyse lexicale unique reçoit des informations de nature visuelle (la lecture) et auditive, (l'écoute des mots de la chanson, ou de la télévision), il se produit une sorte de phénomène d'engorgement cognitif, comme lorsqu'une autoroute à plusieurs voies subit un rétrécissement sur une voie, ce qui produit un ralentissement du trafic.

                   Ce phénomène de goulot d'étranglement se produit aussi à un autre niveau que celui lexical : l'attention.
               Le psychologue Christophe Boujon de l'Université d'Angers ont demandé à des élèves de CM2 (âgés de 10 à 11 ans) de lire une histoire dans une condition de lecture silencieuse et dans trois conditions d'attention partagée. Dans l'une, les élèves entendaient de la musique classique, dans l'autre, ils entendaient (sans le voir) un clip vidéo et dans la troisième condition, ils voyaient et entendaient le clip sur un téléviseur.

                Les résultats ont à nouveau montré que la musique classique ne gêne pas la mémorisation de l'histoire. En revanche, l'audition de paroles provoque une baisse de 25 %, (due au goulot d'étran-glement lexical), et regarder en même temps le clip vidéo provoque une baisse de 40 %.
                Il semble qu'il s'agisse alors d'une baisse attentionnelle, la perception des images du clip mobilise une partie des ressources attentionnelles de l'enfant, qui ne peut plus les consacrer entièrement à la tâche de compréhension et de mémorisation de l'histoire.
                 D'autres expériences ont été faites avec des musiques classiques de chambre, comportant des différences d'intensité modérées et de la musique type rock ou métal, avec de grandes amplitudes de son et des sonorités beaucoup plus rapprochées qui ne laissent pas à l'oreille des temps de repos.
                Outre les dégâts biologique si on écoute ces dernières musiques dans des écouteurs à un niveau trop élevé, ces musique plus typées et bruyantes entraînent une beaucoup plus grande fatigue, qui fait baisser l'attention. 
      http://lancien.cowblog.fr/images/Images2/l448xh336jpgmusiquecerveau1a455.jpg          Donc quand vous faites vos révisions, ou vos tâches scolaires, ne regardez pas des clips vidéo ou la dernière série à la télé? C'est comme si vous conduisiez votre voiture en regardant un DVD !!!
                Travailler en musique, oui, mais une musique sans paroles, une musique douce, sans grandes différences d'amplitude, ni haut volume sonore, genre musique de chambre classique.                
                Notre attention n'est pas élastique, les résultats de notre travail peuvent en dépendre.

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  • http://lancien.cowblog.fr/images/SanteBiologie-1/Synesthesia.png

               Connaissez vous la "synesthésie".
                Comme c'est quelque chose d'assez mystérieux et que la plupart d'entre vous n'en n'ont probablement jamais entendu parler, je vais faire un article sur ce sujet.
                La synesthésie est une correspondance, précise et stable à travers le temps, entre les représentations provenant de plusieurs sens (ou des caractéristiques différentes d'un même sens, par exemple forme et couleur pour la vue).
                Une personne atteinte de synesthésie est appelée synesthète.
                Les personnes concernées ne s'aperçoivent généralement que tard dans leur vie, de cette particularité alors qu’une telle caractéristique de mélange de sensations est assez répandue (quelques % de la population).
                Elle a été découverte en 1812 par le médecin Georges Sachs, mais na été étudiée par les psychologue qu'à partir de 1982 et plus récemment par les neurobiologistes
    .                         L'exemple le plus courant est la vision de lettres ou de chiffres en couleur, alors qu'ils sont écrits en noir et avec une couleur différente attribuée aux divers chiffres ou lettre. (par exemple le 1 est vu rouge, le 2 bleu, le 3 vert, le 4 mauve etc...).C'est ce que l'on appelle la synesthésie "graphèmes-couleurs".C'est une correspondance personnelle; un autre synesthète aura une correspondance différente.

                 Mais il en existe bien d'autres formes :
                            - par exemple, des notes de musique sont associées à des couleurs, spécifiques à chaque personne concernée;
                            - des lettres, des phonèmes ou des mots à des sensations gustatives ou des odeurs;                       
                            - des suites de nombres peuvent prendre des formes particulières dans l'espace,  toujours les mêmes (par exemple en arc de cercle);
                            - dans certains cas rares des mots ou des sensations du toucher sont associées à des émotions ou des sentiments 
               On a trouvé des cas bizarres : une personne dont la rétine anormale ne pouvait voir certaines couleurs, les voyait néanmoins quand elle lisait certaines lettres, preuve que l'oeil n'était pas en cause, mais la région du cerveau qui distingue les couleurs à l'arrière de la tête (zone V4 de l'aire d'interprétation visuelle, qui mesure les proportions de rouge, de bleu et de vert, trois types de neurones de la rétine, étant habituellement sensibles à ces couleurs).
                Les estimations de la proportion de synesthètes ont grandement varié, allant de 1 synesthète sur 20 personnes (Galton, 1883)? ce qui est beaucoup,  à un rapport aussi peu élevé que 1/25.000 (Cytowic, 1989). La plus large étude réalisée suggère une prévalence de 1/2000 au moins (Baron-cohen et al., 1996),
                Aujourd'hui on pense que le phénomène est beaucoup plus courant pour la synesthésie "graphème-couleur" qui pourrait atteindre 1%.

                 Il ne semble pas que cette particularité soit héréditaire au sens habituel.Certes certaines familles comportent plusieurs synesthètes, mais pas forcément de la même catégorie, que cette particularité saute parfois plusieurs générations et on connaît des jumeaux homozygotes dont l'un est synesthète et pas l'autre.
                On penche actuellement une cause initiale épigénétique, pour des gènes qui seraient présents chez de de nombreuses personnes, mais qui ne seraient activées que par un gène de l'ADN silencieux, sous l'effet d'une cause inconnue, au début de la gestation de l'enfant ou dans la prime enfance.

                 La synesthésie n'est pas une maladie physique, ni une, ni une anomalie psychique.
                C'est purement physique et à "la construction". du cerveau.
                Le phénomène est inconscient (on n'a pas prise dessus par la volonté), et il est stable et ne s'aggrave pas, ni ne diminue.
                Malheureusement on ne peut pas y faire grand chose et cela ne se soigne pas, si ce n'est faire accepter par la personne cette légère gêne.
                Quand le cerveau se forme antre le 2ème et le 3ème mois de grossesse, les dendrites et les axones des neurones poussent, sous l'effet de facteurs de croissance et ils sont guidés sur un substrat de cellules autres (astrocytes notamment), par des marqueurs chimiques.
                Ces marqueurs mènent les axones au voisinage des centres avec lesquels le centre auquel appartient le neurone doit être en contact (ce centre pouvant être un groupe de neurones appartenant à un centre plus important).
                Mais c'est au voisinage seulement (quelques microns) qu'un signal chimique arrête la croissance de l'axone et les jonctions finales (synapses), entre axones et dendrites, se font au hasard. C'est pourquoi les cerveaux de deux jumeaux même homozygotes (ADN identiques) ne sont pas tout à fait les mêmes.
                On pense que dans le cas de la synesthésie, certaines jonctions, qui n'existent pas habituellement entre certains centres, se sont faites, du fait probablement d'une anomalie initiale au niveau des facteurs de croissance et des marqueurs qui guident le développement des axones.                       
                 Par la suite et jusqu'à la naissance et même par la suite au cours de l'apprentissage de la première année, de très nombreuses synapses, voire certains neurones vont disparaître.
                En effet la nature a pour règle de faire des jonctions en surplus et celles utiles qui servent souvent restent et se renforcent et les autres disparaissent.
                Normalement les jonctions entre centres différents des sens n'ont pas d'utilité sauf certaines (par exemple un son qui va diriger la vue sur un objet), mais celles là passent en général par des relais, tel le thalamus et les centres amygdalien et le cortex frontal.
                Celles qui, du fait du hasard se seraient formées disparaissent, faute d'emploi.
                Il est possible également que dans le cas habituel, les jonctions inadéquates entre centres des sensations sont éliminées, et qu'elles ne le soient pas toutes dans le cas des synesthètes. Mais on ne sait pas pourquoi.
                 La possibilité de liaisons parasites s'explique facilement dans le cas de la synesthésie "graphèmes-couleurs", les deux zones des centres de reconnaissance des caractères (lettres, chiffres...), et des centres V4 de la vue reconnaissant les couleurs, étant très voisines (voir le schéma).
                Pour l'ouïe et les odeurs, les zones ne sont pas trop éloignées.
                Dans les cas plus complexes, on pense qu'il y a des relais compliqués au niveau du cerveau émotionnel ou avec le centre de Geschwind, qui est responsable de la mémoire des mots (mémoire sémantique).

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