•      Maintenant que nous avons vu quel était le rôle de l'optique de l'oeil, puis de la rétine, je vais vous décrire succinctement l'ensemble du système d'interprétation de la vue et je détaillerai ensuite son fonctionnement dans deux autres articles, après une pose en intermède pour vous reposer.

       http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/chiasmaoptique.jpgSur la rétine de chaque œil se forme une image de ce que nous voyons devant nous, mais la collecte des signaux nerveux de ces images se fait par moitié, coté droit et coté gauche.
        Or le cerveau a besoin (notamment pour des question de vision en relief), de comparer les images des deux yeux. La nature a donc voulu rapprocher les deux images relatives au même coté et les demi images droite et gauche de chaque œil sont donc véhiculées par deux faisceaux différents du nerf optique.
        Pour que les parties droites ou gauches des images des deux yeux soient cote à cote,  les faisceaux intérieurs (vers le nez), se croisent pour rejoindre le faisceau issu de l’autre œil. (voir schéma ci-contre). Le lieu où se croisent ces faisceaux s’appelle le « chiasma optique »

        Après s’être croisées, les fibres du nef optique ont un premier relais dans le thalamus, qui coordonne nos sensations, dans une zone qu’on appelle le « corps genouillé », qui comporte six couches qui sont comme des crêpes superposées repliées sur elles même en forme comme l’articulation du genou
               Des fibres relient ces diverses couches à celles des neurones de l a première aire V1, du centre d'interprétation de la vue, à l’arrière du cerveau, dans le lobe occipital,  mais ceci dans les deux sens, cette aire d’interprétation agissant aussi en rétroaction sur les neurones du corps genouillé.
          Les signaux de chaque neurone de la rétine arrivent dans cette aire V1, sur des groupes spécifiques de neurones, de telle sorte que, si on analyse par exemple sur le cerveau d’un singe, les signaux de ces neurones, on s’aperçoit qu’ils repréentent exactement une image de ce que nos yeux voient; (voir ci dessous lel schéma du singe).
        C’est pourquoi l’aire V1 est appelée l’aire « primaire » de la vison qui nous fournit une image « brute » de ce que nous voyons, avec des nuances d’intensité, mais, en quelque sorte, en niveau de gris pour comparer à votre imprimante.
        Ce traitement au niveau de l’aire V1 est assez grossier, alors que nous avons parfois besoin de voir des détails et de préciser des formes : l’aire V1, envoie de nombreuses connections vers une aire secondaire V2, qui analyse les détails dont nous avons besoin.

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/corpsgenouille.jpghttp://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau1/singeoeil.jpg

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/airesvision.jpg
















           

     

          L’analyse des stimuli visuels amorcée dans V1 et V2 se poursuit ensuite à travers deux grands systèmes corticaux de traitement de l’information visuelle. La première est une voie dite « ventrale »qui s’étend vers le lobe temporal et serait impliquée dans la reconnaissance des objets. La seconde est une « voie dorsale » qui se projette vers le lobe pariétal et serait essentielle à la localisation des objets (et de notre position dans l’espace) et cela dans trois nouvelles aires V3, V4 V5, qui se dédouble entre ces deux voies; (voir schéma ci dessus).

        L’aire V3 se sert des données de V1 et V2 pour analyser les formes et va donc nous permettre ensuite une reconnaissance des objets et de leur environnement, mais en participant à l’analyse de leur mouvement  (en repérant des positions successuioves fournies par l’aire V5.)
        Cette aire V5 par des balayages successifs, repère les positions des sensations identiques à des instants différents et donc analyse les mouvements, et notamment les vitesses de déplacement. Ses neurones partent des données des aires V1 et V2 qui concernent chaque point de l’image, mais ensuite l’aire V5 est aidée par l’aire V3 pour reconstituer le mouvement d’un objet complet, l’aire V3 aidant à assembler les points qui le constituent.
        L’aire V4 est reliée surtout aux informations des cônes de la rétine et sert donc à l’interprétation des couleurs.

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/i02crvis3b.jpg

          Enfin deux aires plus évoluées sont l’aboutissement de ce traitement : ce sont les aires 6 et 7 mais que je préfère appeler le « quoi » et le « où ».
        Les aires « Quoi », sur la voie ventrale, dans les lobes temporaux, rassemblent les renseignements sur l’objet et donc permettent de l’identifier et elles sont en liaison avec les aires du vocabulaire (Geschwind), pour donner un nom à l’objet reconnu, et avec l’hippocampe pour mettre en mémoire d’éventuelles données.
        Les aires « Où » sur la voie dorsale et dans les lobes pariétaux localisent les objets et leur mouvement, établissent une carte qui nous permet de nous orienter, de nous déplacer et d’agir.
        Ces données du Quoi et du Où, sont évidemment transmises au cortex préfrontal, le chef d’orchestre du cerveau, qui prend les décisions d’action réfléchies, et oriente éventuellement les yeux (et les autres sens), pour obtenir des informations supplémentaires.

        Le cortex visuel est l’un des éléments les plus volumineux du cerveau : il compte environ 5 milliards de neurones. (sur les 100 milliards du cerveau). J’en parlerai après demain, après demain, un intermède.

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  •      Un lecteur m'a fait remarquer que je parlais souvent du centre de traitement de la vision à l'arrière de notre crâne, mais que je n'avais jamais décrit ces centres. C'est vrai
         Je vais essayer de le faire, mais c'est assez compliqué et j'y consacrerai 4 articles. J'espère que vous aurez le courage de les lire jusqu'au bout.

    Commençons évidemment par les yeux

        Comme vous le savez déjà sans doute, l’œil a un obturateur la paupière, un diaphragme, l’iris, qui limite la quantité de lumière incidente selon la luminosité extérieure, puis une lentille, le cristallin, qui change sa focale en se contractant grâce à des muscles spécifiques, et enfin le récepteur sensible, la rétine.
        Comme vous le voyez sur les schémas ci dessous, le cristallin adapte sa courbure à la distance de l’objet que l’on veut voir, de telle sorte que l’image lumineuse de l’objet se forme sur la rétine, mais inversée.

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/oeilhumain.jpghttp://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/images-copie-2.jpg


    Et qu'y a t'il dans la rétine

         Dans la rétine , dont j’exposerai ci-dessous le fonctionnement, nous trouvons deux grandes catégories de cellules nerveuses : les cônes et les bâtonnets.
        Il y a 120 millions de bâtonnets, qui sont sensibles aux très faibles luminosités, mais en noir et blanc. Ils ne fournissent pas une image très nette et sont répartis sur toute la rétine, sauf en son centre.
        Il y a 6 millions de cônes, qui fournissent un signal d’intensité différente selon les énergies (ou longueurs d’onde) de la lumière reçue. Il en existe trois grande catégories dont le maximum de sensibilité est soit pour les lumières bleues, soit pour les lumières vertes, soit pour les lumières rouges. L’image qu’ils fournissent est beaucoup plus nette.
        On trouve des cônes sur toute la rétine, mais une zone centrale, appelée la « fovéa », est dotée exclusivement de cônes.
        Nous ne voyions vraiment très nettement que dans cette région, et la fovéa en surface ne représente que 1:10 000 ème de la surface de la rétine : elle est de la taille d’une tête d’épingle.
        En fait nous voyons de façon floue sur 180 d° vers l’avant, et nous repérons les objets les mouvements qui nous intéressent. Nous détournons alors la tête et l’oeil de telle sorte que l’image de la cible convoitée se forme sur la fovéa, de façon à en voir les détails nets.
        Nous verrons par la suite que alors que la fovéa ne représente que 0,01% de la rétine, de l’ordre de 10% du cortex cérébral sera consacré à l’interprétation de ses images : c’est pour cela que nous avons une image précise de ce que nous regardons.
        Par ailleurs, à l’endroit où le nerf optique se rassemble pour quitter le globe oculaire, il n’y a pas de rétine et donc une "tache aveugle" (voir schéma ci-dessus).

    Comment fonctionne la rétine ?

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/retine.jpg    C’est un tissus neuronal très fin (0,1 à 0,5 mm d’épaisseur selon les endroits), organisé en plusieurs couches de cellules (jusqu’à une dizaine).
        Chose curieuse (voir schéma ci contre qui montre l’organisation de la rétine dans son épaisseur, et où la lumière vient d’en haut du schéma), les cônes et les bâtonnets sont dans les couches inférieures de la rétine, donc à l’opposé de la lumière.
        Bien que les tissu de la rétine ne soient pas opaques, cette position ne facilite pas la tâche de ces neurones.
        La nature a trouvé la solution : les cellules dites « de Müller », dont le rôle a été montré en 2007 par Kristian Franz de l’Université de Leipzig, qui ne sont pas des neurones, mais des cellules gliales de soutien, sont de véritables fibres optiques, et chaque cône ou bâtonnet a ainsi son conduit qui lui apporte la lumière et la vue extérieure.
        Je rappelle que nous y trouvons 120 millions de bâtonnets, sensibles aux faibles luminosités, mais pas à la couleur, et 6 millions de cônes, sensibles notamment selon les types, au rouge, au vet ou au bleu.

        Au dessus de la couche de cellules sensibles (cônes et bâtonnets) se trouve une deuxième couche intermédiaire de neurones, les cellules bipolaires, appelées ainsi car elles servent simplement de relai de transmission entre ces cellules sensibles et la troisième couche de neurone dont les axones vont former le nerf optique : les cellules ganglionnaires. Il y a donc autant de cellules bipolaires que de cônes ou bâtonnets (soit 126 millions).
        Ces cellules bipolaires ont pour rôle de rassembler certaines données. En effet si un cône est presque toujours lié par leur intermédiaire à une cellule ganglionnaire, par contre une cellule ganglionnaire est liée à plusieurs bâtonnets par leurs cellules bipolaires.
        Il n’y a au total, que 1,5 millions de cellules ganglionnaires. Il ne faut donc pas croire que l’image retransmise sur toute la rétine, aurait 126 Mpixels, (cônes + bâtonnets) mais seulement 1,5 Mpixels.
        En fait c’est plus compliqué que cela.

        D’abord il y a des cellules ganglionnaires de divers types principalement :
            - de petites cellules type P, (80% du total), liées chacune à un cône de la fovéa, et à quelques cônes dans le reste de la rétine, sensibles aux informations de couleur. Elles ne couvrent qu’un petit champ visuel, ont besoin de beaucoup de lumière pour que l‘influx provenant du cône soit suffisant, mais fournissent des informations d’image précises. C’est un héritage de l’évolution, nos ancêtres préhistoriques ayant besoin de voir facilement des fruits dans les arbres, ou nettement un danger d’un prédateur dans un buisson.
            - de grandes cellules, type M, qui réagissent rapidement même si la lumière est faible, et ne sont pas sensibles à la couleur car liées à plusieurs bâtonnets. Leur champ visuel est donc plus large.   
            - des cellules de type C, rares et dont on ne sait pas le rôle.

    http://lancien.cowblog.fr/images/Cerveau2/retine.png    Il y a ensuite d’autres cellules que l’on peut voir sur cet autre schéma : les cellules horizontales et les cellules amacrines, qui n’ont que deux prolongements analogues à des axones, mais se ramifiant à leur extrémités comme des dendrites (on les appelle des neurites).
        Les cellules horizontales transfèrent des informations entre cônes ou entre bâtonnets, ou avec une autre cellule bipolaire que celle affectée à un neurone sensible. Cela module les signaux en fonction des difficultés d’interprétation des images. leur rôle est d’inhiber l’activité des cellules avoisinantes. Cette suppression sélective de certains signaux nerveux s’appelle l’inhibition latérale et son rôle général est d’augmenter l’acuité d’un signal sensoriel. Dans le cas de la vision, quand une source lumineuse atteint la rétine, elle peut illuminer fortement certains photorécepteurs et d’autres beaucoup moins. En supprimant le signal de ces photorécepteurs moins illuminés, les cellules horizontales assurent que seul le signal des photorécepteurs bien illuminés est transmis aux cellules ganglionnaires, améliorant ainsi le contraste et la définition du stimulus visuel.
        Les cellules amacrines sont en contact entre cellules bipolaires et cellules ganglionanires et forment une route alternative des informations entre ces deux types de cellules. On ne connait pas bien leur rôle et plusieurs types de ces cellules utilisent des neurotransmetteurs différents dans leurs synapses.
        On sait que certaines d’entre elles transmettent un message excitateur quand la lumière est forte et inhibiteur si elle est faible, diminuant ainsi l’importance dans une image de certains bâtonnets faiblement éclairés.

        Pour compliquer encore un peu ces explications si vous n’êtes pas fatigués :
        D’abord certaines de ces cellules amacrines sont montées deux par deux, un  peu comme des bascules à transistors, c’est à dire qu’elles inhibent à tour de rôle la transmission vers les cellules ganglionnaires : l’une peut transférer quand la seconde est inhibée et vice versa.
        Il semble que ce système permet des transmissions alternative d’images, un peu comme cela existe dans les projecteurs de cinéma et contribue à la vison des mouvements.
        Le deuxième point est de la multitransmission en parallèle. Il semble, à la suite d’études menées en 2009/10, que les cellules ganglionnaires transmettent plusieurs images de la scène, vue à un instant donné, et ce, avec des filtres différents, soit au niveau de la rétine, soit au niveau du corps genouillé du Thalamus. On a observé jusqu’à 17 images parallèles.
        Ces images partielles ont été en partie reconstituées et elles diffèrent de l’image définitive que nous aurons in fine.
        Finalement l’image reconstituée par le cerveau est fonction de toutes ces données transmises, mais il semble d’une part que la rétroaction des centres d’interprétation sur le thalamus agisse aussi sur les informations transmises et que quelques informations en provenance d’autres neurones que ceux de la rétine puissent également être transmis.

        Vous pouvez donc constater que le rôle de la rétine est très compliqué et pourtant j’ai essayé de simplifier au maximum les explications et je ne suis pas un spécialiste de la question. En fait le nombre de types de cellules et leurs rôles sont encore plus complexes.

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  • Développement des perceptions de l'enfant.


        J’ai toujours beaucoup d’intérêt pour la formation du cerveau et des capacités des enfants, notamment très jeunes.
        Des chercheurs, comme Olivier Houdé et Grégoire Borst, du CNRS, ont expliqué l’approche de la réalité par le cerveau des jeunes enfants, et citent notamment les expériences de Piaget et les études qui ont montré que le cortex préfrontal, qui est encore en cours de développement, ne savait pas encore inhiber certains réflexes naturels, issus de nos sensations.
        Piaget pensait que l’approche de la réalité pour les enfants entre un et six ans, comprenait trois stades importants :
            - la permanence de l’existence d’un objet;
            - le nombre d’objets et la comparaison de ces nombres;
            - la classification des objets en catégories.

        Piaget avait remarqué que s’il cachait plusieurs fois un objet au même endroit, un enfant, entre un et deux ans, qui ne voyait plus l’objet dans le pièce, le recherchait, ce qui prouvait qu’il avait une notion de son existence et de la permanence de cette existence.
        Mais si l'on changeait l’objet de cachette, l’enfant allait voir dans la cachette première et était tout étonné de ne pas y trouver l’objet. Cette permanence dépassait donc l’objet, mais concernait aussi le lieu où il pouvait être.

        Dès un à deux ans, sans connaître la numération, un enfant a une idée des grandeurs. Pour lui ce sont les sensations de perceptions qui dont primordiale et il se représente donc le nombre d’objets par la longueur ou la surface qu’ils occupent.
        Une expérience de Piaget, devenue classique pour les psychologues, est celle ou l’on aligne deux rangées d’objets de même longueur, contenant le même nombre d’objets. L’enfant interrogé répond qu’il y a le même nombre d’objets dans chaque rangée.
        Sans changer le nombre d’objets, on les déplace pour qu’une ligne soit plus longue que l’autre. L’enfant qui ne sait pas compter, (ou celui qui sait compter, mais répond trop vite intuitivement), dit qu’il y a davantage d’objets dans la ligne la plus longue.

        La troisième expérience est de montrer dix photos de chats, trois photos de chiens et de demander à l’enfant quel est le plus grand nombre de chats ou d’animaux. Alors que le jeune enfant saura dire qu’il y a plus de chats que de chiens, il sera embarrassé par cette question, s’il n’a pas encore assimilé la catégorisation hiérarchique animaux = chiens et chats. Là nous sommes dans un stade plus avancé, non plus de sensation, mais de compréhension du langage.
        Les moyens expérimentaux ont fait de grands progrès depuis Piaget, et on sait aujourd’hui, mesurer les réactions du cerveau, à quelques millisecondes près; on s’aperçoit alors que l’enfant qui répond correctement aux deux première tests met environ 150 ms de plus que l’enfant qui se trompe, ayant fait confiance pour répondre, à ses sens et à l’habitude de leurs perceptions.
        Que se passe t’il pendant ce délai ?
        L’IRM permet de voir que pendant ce délai c’est le cortex préfrontal qui est sollicité, et c’est une zone dont les neurones ont pour action d’inhiber une première réponse, qui est celle délivrée par l’automatisme, l’habitude et l’intuition, et qui obligent le cortex préfrontal à reconsidérer la question, à réfléchir et à appliquer une autre stratégie : dans le premier cas se rendre compte que l’objet est peut être ailleurs et le chercher, dans le second cas inhiber la réponse « longueur » et compter les objets des deux rangées.
        L’enfant naît avec un cortex préfrontal capable de remplir cette mission, mais qui n’est pas mature, et qui doit apprendre ce processus d’inhibition du réflexe initial de ne pas faire une confiance absolue aux sensations, et de reconsidérer le problème.

        Le troisième cas est plus complexe, mais il relève du même processus, car l’enfant à qui on a appris le sens du mot « animaux », met aussi environ 150 ms de plus à comparer le nombre animaux/chats que le nombre chats/chiens. Il lui a fallu inhiber le premier réflexe, de comparer des concepts analogues de même niveau, et reconstituer la hiérarchie animaux par rapport à chats et chiens et faire l’addition chats + chiens.
        Mais le cortex préfrontal n’est pas seul en cause;le cortex pariétal gauche, qui préside au langage, et notamment le centre de Broca, sont aussi sollicités. Il n'y a pas production de langage audible, mais la réflexion passe par un langage interne au cerveau, qui sollicite Broca de la même façon.

        En définitive, on voit que le développement de l’enfant passe d’abord par celui de ses sens, d’abord apprendre à manipuler des objets et ensuite faire des opérations plus abstraites, à partir des perceptions, et les mécanismes mis en place par l’apprentissage sont très puissants, de telle sorte qu’ils peuvent induire en erreur le cerveau.
        il faut donc que le cortex préfrontal apprenne à inhiber ces réflexes intuitifs pour se demander s’ils sont corrects et éventuellement rechercher une autre stratégie. Notre cortex préfrontal va ainsi mettre, peu à peu, depuis la naissance, de l’ordre de 20 ans à devenir mature.

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  •           J’ai déjà fait le un article sur le toucher et les cellules sensitives que contient la peau (27 mai 2019). Mais un article de la revue « Pour la Science » (août 22) m’a appris des notions nouvelles sur certaines des cellules qui la composent, les kératinocytes, et je voudrais résumer ce que j’ai appris.          
              Dans mon précédent article, j’avais résumé sur un schéma que je reprends ci-après, une  description de la peau, qui est le plus grand organe sensoriel de notre corps, quant aux cellules sensitives qu’elle contient.

              Barrière protectrice entre l’environnement et notre corps, elle empêche des corps étrangers de pénétrer, notamment les agents pathogènes, nous protège contre les rayonnements UV et la déshydratation.
             La couche externe de la peau est composée à 95% de cellules kératinocytes, des cellules peu différenciées de la couche profonde inférieure de l’épiderme qui prolifèrent en permanence et migrent vers la surface, en 28 jours environ. Elles perdent alors leur activité de prolifération, et se différencient, produisant en particulier des filaments très résistants d’une protéine, la kératine.
             Les cellules kératinocytes perdent leur noyau et forment alors une couche souple, résistante et hydrophobe.
            Les 5% restant de l’épiderme sont constituées de mélanocytes, qui pigmentent l’épiderme, grâce à une protéine, la mélanine.
             En outre des cellules immunitaires du type macrophages (les cellules de Langerhans) protègent contre la prolifération d’agents pathogènes.
             On trouvera, de plus, les glandes sudoripares, qui produisent la sueur, et les poils avec leur bulbe, et des cellules sensitives spécialisées.

    Les récepteurs sensitifs de la peau

              Les cellules sensitives sont de trois sortes :

                    - les cellules sensitives de sensibilité tactile légère, associées à de grosses fibres nerveuses entourées de myéline et donc à vitesse importante de transmission. Ces cellules sont de plusieurs sortes :
                         • les cellules de Merkel, réagissent à la pression en envoyant des signaux électriques tant que cette pression se maintient. Leur grande sensibilité permet de localiser précisément le lieu de pression et de détecter éventuellement des corps étrangers.
                        • les corpuscules de Messmer réagissent aux mouvements latéraux de la peau par un signal court, par exemple lorsqu’un vêtement glisse sur notre peau.
                        • les corpuscules de Ruffini, qui envoient un signal progressivement décroissant lorsque la peau est étirée, par exemple lorsqu’un objet est entre nos doigts.
                        • les corpuscules de Vater-Pacini, qui réagissent par des signaux courts à des changements de pression alternatifs, au contact d’une vibration ou lorsque nous caressons une surface ondulée.

                   - les cellules détectrice de stimulations de haute intensité, à l’origine notamment des sensations de douleur. Ce sont des terminaisons libres, qui sont reliées à des fibres à haute vitesse, mais aussi à des fibres non myélinisées. Les premières transmettent les informations urgentes de douleur, afin de réagir vite, les autres informent sur les pressions importantes que subit la peau.

                   - les cellules sensibles à la température, (et donc à la chaleur ou au froid), liées à des fibres nerveuses myélinisées de faiblre diamètre, à très haute vitesse de transmission (pour des raisons de sécurité vis à vis des brûlures). Certaines cellules sont notamment sensibles aux températures de plus de 42 d°C et transmettent alors une information d’alerte rapide, qui par exemple nous fait retirer immédiatement la main si nous touchons un objet à une température supérieure, afin d’éviter les brûlures graves.

                  - En outre les follicules pileux, à la base des poils, ont deux récepteurs sensitifs, l’un qui indique par un signal court, lorsque le poil est déplacé latéralement, l’autre qu’émet un signal permanent lorsque le poil est mis en mouvement.

             Lorsqu’une cellule nerveuse de la peau est excitée, des protéines ingérées dans la membrane cellulaire des cellules constituent un canal ionique, qui va laisser entrer des ions calcium ou sodium et ainsi créer une dépolarisation qui va entrainer l’émission d’un signal nerveux dans les axones. Des canaux ioniques différents réagissent pour les signaux de pression et les signaux thermiques, ces derniers étant transmis par les canaux ioniques appelés « TRP », qui sont également sensibles à certaines substances chimiques.

             On considérait jusqu’à présent que ces diverses cellules nerveuses étaient les seules à transmettre des sensations au cerveau voie la moelle épinière.
            Mais on s’est aperçu en 2002 que les kératinocytes jouaient aussi un rôle important dans la transmission des informations sensorielles, car un canal ionique spécifique TRP pouvait transmettre les informations de chaleur, mais comme les kératinocytes ne sont pas des cellules nerveuses et n’ont donc pas d’axone, le mécanisme de transmission de l’information était inconnu. l
    Le problème est aujourd’hui élucidé.
             D'autre part, les chercheurs ont découvert que les keratinocytes réagissaient aussi à des stimuli de pression et qu’ils étaient à l’origine de sensations de douleur lors d’une blessure de la peau.

    Les récepteurs sensitifs de la peau          En ce qui concerne les informations de pression et de température, les cellules kératinocytes produisent, lorsqu’elles cont excitées, de l’Adénosine Tri Phosphate (ATP) dans l’espace intercellulaire..
              L’ATP active des récepteurs P2X4 sur les membranes des neurones et donc déclenchent l’influx nerveux.
            Par ailleurs il active les récepteurs P2Y2 des autres cellules kératinocytes voisines et produit ainsi des vagues ‘ions calcium, qui se propagent ainsi dans les cellules voisines et activent des neurones voisins (voir schéma ci-dessus).

     

    Les récepteurs sensitifs de la peau          En ce qui concerne les informations de douleur, la présence d’une blessure au milieu de cellules kéranitocytes provoquera sécrétion de plusieurs substances chimiques :
                  - de l’ATP qui va permettre l’excitation de neurones voisins.
                  - des cytokines qui vont produire une inflammation locale.
                  - une protéine NGF (un facteur de croissance) qui va faciliter l’action de l’ATP et des cytokines..
                  - une protéine : l’endothéline 1 (ET1), qui va déclencher des récepteurs ETA et ETB sur les neurones et sur les kératinocytes voisins. Cette action va engendrer dans les kératinocytes la productiond’une béta-endorphine qui va atténuer le signal de douleur dans le neurones (voir le schéma ci-contre).
              Ainsi il y a, à la fois, une alerte douleur, mais aussi une réaction pour la limiter.

    Les récepteurs sensitifs de la peau         Enfin les kératinocytes protègent la peau contre les rayons ultraviolets.
             Dans la couche basale de la peau des cellules mélanocytes ont une durée de vie longue, mais se renouvellent peu. Ils sécrètent de la mélatoninequ'ils fournissent à des mélanocytes grâce à des prolongements membranaires. La peau est ainsi pigmentée. est plus résistante aux UV.

             Les rayonnements UV ont des effets bénéfiques, car il augmentent la synthèse de vitamine D, d'hormone et d'endorphines. Mais, à dose plus élevée et en fonction de la mélinisation de la peau et des conditions de l'exposition, les keratinocytes sont amenés à secréter les substances responsables de l'inflammation et de la douleur.

     

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  •     Mon article d'avant-hier m'a valu quelques mails de lectrices ou lecteurs, choqués du fait que j'ai écrit que les couleurs, cela n'existait pas, mais que c'était une création de notre cerveau.
         Alors je vais mieux m'expliquer.

        Ce qui correspond à la sensation d’une « couleur », c'est l'arrivée sur notre rétine d'une particule sans masse, le photon, qui possède une certaine énergie déterminée et selon la valeur de cette énergie, nous avons une sensation différente.
        La réalité de départ c’est donc le photon qui, pour régir sur l’oeil, doit avoir une énergie caractéristique très faible comprise entre 2,5 et 5 10-19 joules.
        Heureusement la lumière que nous recevons contient beaucoup de photons.
        Donc sur notre rétine arrivent des photons, sur des cellules nerveuses en forme de bâtonnets et de cônes. Ces cellules contiennent des protéines, qui réagissent sous l'effet de l'énergie laissée par les photons et déclenchent un influx nerveux dans les axones des cellules rétiniennes.
        Les bâtonnets sont sensibles à des luminosités très faibles et permettent une vison très précise alors que certains cônes ont une réaction électrique maximale quand ils sont éclairés avec des radiations dites « bleues », d’énergie 4,2 10-19 joules, d'autres ont une sensibilité  maximale avec des radiations dites « vertes », d’énergie 3,7 10-19 joules et une troisième catégorie qui présente une réponse maximale pour les radiations dites « rouges » d’énergie 3 10-19 joules.
        Des photons correspondant au bleu n'excitent donc que les cônes “bleus”, ceux correspondant au vert les cônes “verts”  et ceux correspondant au rouge les cônes “rouges”. S'il s'agit d'une couleur intermédiaire, l'excitation est transmise aux trois sortes de cônes dans des proportions qui dépendent de l'énergie du photon incident.
        C'est un peu comme votre imprimante qui ne “tape” que des points bleus, verts ou rouge, mais par leur mélange en proportions différentes, reproduit des millions de couleurs différentes.
        Ces signaux de la rétine sont envoyés sur des neurones spécialisés de notre cerveau, dans les centres d’interprétation de la vue, (à l'arrière du crâne au dessus de la nuque) qui vont “mesurer” la proportion de signal provenant des cônes bleus, verts et rouges et donner ainsi une caractéristique de la lumière reçue.
        Nous mémorisons cette perception et ce sont nos parents (et frères soeurs, nounous, professeurs...) qui nous disent : cette sensation s'appelle « bleu », celle ci « rouge », celle là « verte », cette autre « jaune », « orange » ou « marron »...... 
        Bref la couleur cela n’existe pas, c’est un codage des sensations de notre cerveau par le langage. Le réel c'est le flux de photons et notre sensation nerveuse mémorisée correspondante.

        C'est un peu plus compliqué car nous ne regardons pas des photons, mais des objets.
        Pourquoi un « poisson rouge »  est il rouge ? : parce que sa nature en surface (ses écailles), est telle qu'il réfléchit tous les photons « rouges » et absorbe les photons des autres longueurs d’onde, donc couleurs.
         En fait nous ne savons pas ce que voit réellement notre “professeur” qui nous a dit que c'était un poisson rouge. Peut être son influx nerveux est il légèrement différent du nôtre, mais c'était le même poisson rouge. Donc nous avons appelé rouge la sensation produite par ce poisson quel que soit le flux nerveux individuel que nous ayons ressenti l'un et l'autre. C'est le principal : reconnaître la couleur de l'objet caractérisée par ce code “rouge”, c'est à dire sa capacité à réfléchir les photons d'énergie « rouge ».

    Les couleurs, cela n'existe pas.

         Quand les photons réfléchis par l'objet correspondent à un mélange de photons d'énergie différentes, la proportion d'influx provenant des cônes bleus, verts et rouges est caractéristique de cette propriété de réflexion de l'objet.
         Cette caractéristique de réflexion des photons est la “couleur “de l'objet.    

          Nous mémorisons cette sensation et on nous apprend ensuite que c'est du violet, de l'indigo, de l'orange, du bleu de Prusse…
        Là encore la réalité, c’est l’objet et les photons qu’il absorbe et réfléchit, et la  sensation dans notre cerveau après que les photons réfléchis par l’objet, aient atteints notre rétine. Ensuite nous codons en mémoire cette sensation par un mot de notre langage, et l’ensemble des mots correspondant à ces sensations est dénommé
    « couleur ».

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